Bahreïn

Bahreïn

Constitué à plus de 90 % de désert, Bahreïn est un archipel d’une trentaine d’îles originelles.

758 km2

Monarchie constitutionnelle

Capitale : Manama

Monnaie : dinar bahreïni

1,5 million d’habitants dont 46 % de Bahreïnis

Aux îles initiales, dont la plus importante donne son nom au pays, s’ajoutent environ 100 km² d’îles artificielles construites sur le golfe Persique. Comptant 161 km de côtes, le pays est relié à l’Arabie saoudite par un pont.

Un peu plus de 50 % de la population est arabe (les Bahreïnis, ainsi que près de 5 % des étrangers). Les 49 % d’immigrés restant proviennent majoritairement du sous-continent indien, d’Asie du Sud, d’Iran…

81 % de la population est musulmane, à 65 % chiite. Le reste se répartit entre chrétiens (9 %), hindouistes et bouddhistes (environ 10 %).

En 1968, sept ans après avoir donné son indépendance au Koweït, les Britanniques annoncent leur intention de se retirer de l’ensemble de leurs protectorats du Golfe et de les réunir dans une Fédération unique. Mais Bahreïn, comme le Qatar, refusent cette solution et décident de faire cavalier seul par rapport aux autres émirats qui formeront les Emirats arabes unis. Compte tenu de l’importance de la population chiite à Bahreïn, l’Iran revendique le territoire qu’il considère comme sa quatorzième province », mais il doit suivre les résultats du référendum organisé l’ONU : l’indépendance est proclamée en 1971.

De confession sunnite dans un pays très majoritairement chiite, la dynastie au pouvoir renforce rapidement son pouvoir, en abolissant la Constitution et le Parlement (1975) et en interdisant certaines professions aux chiites, notamment dans la police et dans l’armée. En effet, ils sont parfois considérés comme une « cinquième colonne » iranienne, bien qu’ils aient largement refusé leur rattachement à l’Iran en 1971. En pratique, la communauté chiite du pays est loin d’être homogène, divisée entre les Bahrani arabes, soutenant globalement le pouvoir sunnite, et les Ajemi d’origine iranienne, majoritaires et acquis à l’opposition.

Cette discrimination sociale est ressentie d’autant plus durement que les autres emplois sont majoritairement attribués à des travailleurs immigrés. Au milieu des années 1990, cette situation conduit à d’importants troubles qui débouchent sur l’arrestation et la condamnation de centaines d’opposants chiites (y compris des enfants ayant dessiné des graffitis sur des murs) et sur une brouille diplomatique avec l’Iran, accusé de soutenir en sous-main ses coreligionnaires. En juin 1996, la police bahreïnie annonce même le démantèlement d’un réseau paramilitaire, dont les membres auraient été formés dans les camps des Pasdarans iraniens à Qom puis dans ceux de leur allié, le Hezbollah libanais. La tension avec le voisin iranien est attisée par le rôle d’allié fidèle des Etats-Unis que joue Bahreïn, siège du Commandement naval des opérations alliées en Afghanistan.

En 1999, le décès de l’émir Issa ibn Soulman al Khalifa et son remplacement par son fils aîné Hamad ibn Issa conduisent à une relative ouverture sur le plan intérieur. La constitution de 1973 est rétablie et, pour la première fois en 27 ans, des élections sont organisées en octobre 2002. Toutefois, le scrutin est boycotté par une partie de l’opposition libérale et chiite car le roi a profité d’une révision constitutionnelle pour instaurer une deuxième chambre aux pouvoirs équivalents à ceux de l’Assemblée et dont il choisit tous les membres… de même qu’il continue à désigner le gouvernement et son chef.


Répression accrue contre les chiites

Au fil des scrutins, le principal Bloc chiite, al-Wifaq (l’Entente), n’en conforte pas moins sa place de premier parti d’opposition. Il est également en première ligne quand, en février 2011, la fièvre des « printemps arabes » gagne l’émirat. Les chiites réclament un changement de régime (monarchie constitutionnelle, voire république) et un rééquilibrage du pouvoir, accusant les Khalifa de minorer progressivement leur part dans la population en naturalisant massivement des immigrés de confession sunnite. S’y ajoutent les très nombreux travailleurs qui demeurent étrangers (Pakistanais, Jordaniens, Yéménites…) et qui, eux aussi, sont majoritairement sunnites. La contestation ne faiblissant pas, Manama saisit le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et obtient l’envoi d’un millier de soldats saoudiens et d’un demi-millier de policiers émiratis à Bahreïn, ce qui provoque l’irritation de Téhéran. Le calme revient, mais de façon précaire : les manifestations, parfois mortelles, reprennent en janvier 2012 et durent tout le printemps, s’exerçant notamment contre un projet d’union saoudo-bahreïnie. Elles continuent de manière plus épisodique, mais tout aussi mortelle, les années suivantes, faisant des victimes jusque dans les rangs de la police et même du contingent émirati.

Un nouveau tour de vis est donné en 2016-2017, avec la dissolution d’Al-Wifaq et l’arrestation de son chef, suivies de condamnations à mort de meurtriers supposés de policiers, d’un amendement constitutionnel permettant de traduire des civils devant des tribunaux militaires et de la dissolution du Waad, le seul parti sunnito-chiite du pays, accusé d’avoir donné le titre de « martyrs de la patrie » à trois hommes exécutés en janvier 2017. La même année, le pouvoir réprime dans le sang un sit-in organisé devant la maison du guide spirituel des chiites du pays, après sa condamnation (et sa privation de la nationalité bahreïnie). En novembre 2018, le chef d’Al-Wifaq se voit même condamner à la détention à la perpétuité pour intelligence avec le Qatar.

Dans le conflit diplomatique ouvert par l’Arabie saoudite avec le Qatar, en 2017, Bahreïn a en effet clairement pris parti pour Riyad dont il dépend étroitement sur le plan économique, malgré des tentatives de diversification, notamment bancaire : en effet, l’exploitation pétrolière bahreïnie a commencé à décroître dès les années 1970 et son plus grand gisement restant, offshore, est coexploité avec l’Arabie saoudite qui, de surcroît, fait également raffiner une partie de son propre brut à Bahreïn. En outre, l’émirat continue à considérer que le Qatar, qui lui était autrefois rattaché (cf. Péninsule arabique) est une de ses dépendances . Circonstance aggravante : le Qatar est le seul pays du CCG à ne pas avoir apporté son soutien au pouvoir bahreïni dans la crise qu’il a traversée au milieu des années 1990. La Cour internationale de justice toutefois pu trancher, en 2001, un conflit frontalier, hérité de la colonisation britannique : elle a reconnu la souveraineté de Bahreïn sur l’archipel de Hawar et les hauts-fonds (potentiellement riches en pétrole et en gaz) de Qitaat Jarada, ainsi que celle du Qatar sur la région de Zoubara (au nord-ouest de la péninsule).

Dans sa volonté d’endiguer l’influence iranienne dans la région, Bahreïn annonce une normalisation de ses relations diplomatiques avec Israël, en septembre 2020, un mois après une démarche similaire des Émirats arabes unis. Bénéficiant du soutien américain, l’initiative bénéficie aussi de l’aval de l’Arabie saoudite, même si Ryad continue à soutenir officiellement la doctrine Abdallah : élaborée en 2002, celle-ci conditionne toute normalisation avec l’État hébreu à la création d’un État palestinien dans les frontières de 1967.

Crédit photo de une : Sateesh Solakal / Pixels