309 500 km²
Monarchie absolue (Sultanat)
Capitale : Mascate
Monnaie : rial omanais
4 millions d’habitants, dont 80 % d’Omanais
La position du sultanat à l’extrême sud-est de la péninsule d’Arabie, à l’entrée du Golfe Persique, lui a valu un temps le surnom de « concierge du Golfe ». Il compte un peu moins de 2 100 km de côtes le long de la mer d’Arabie au Sud et le golfe d’Oman au Nord-Est.
Il partage des frontières terrestres avec les Émirats arabes unis au nord (410 km), l’Arabie saoudite à l’ouest (676 km) et le Yémen au sud-ouest (288 km). Le centre du pays est couvert d’une vaste plaine désertique, tandis que plusieurs chaînes de hautes montagnes (dont les Monts Hajar culminant à plus de 3 000 m) surplombent ses côtes nord et sud-est. Chaud et sec à l’intérieur des terres, le climat est humide en bord de mer et même en montagne, où la présence d’eaux souterraines permet les cultures en terrasses.
Le pays compte deux curiosités territoriales : la péninsule de Moussandam (1 800 km²), stratégiquement placée à l’entrée du détroit d’Ormuz, est séparée du reste du territoire par les Émirats arabes unis, à l’intérieur desquels se trouve l’enclave omanaise de Madha[1].
La population omanaise est très majoritairement arabe, avec des minorités Jabali (peuple sud-arabique) dans le Dhofar et Baloutche. Les 20 % d’immigrés proviennent du Moyen-Orient et du sous-continent indien.
86 % de la population est musulmane, très majoritairement ibadite comme la famille royale ; les sunnites sont environ 20 % (et dominants dans le Dhofar). Un peu plus de 6 % est chrétienne et un peu moins de 6 % hindouiste.
[1] Enclave de Madha, à l’intérieur de laquelle se trouve l’enclave émiratie de Nahwa.
Rapidement islamisées après la mort de Mahomet, les populations de l’ancien Pays de Magan deviennent, au milieu du VIIIe siècle, le siège d’un imamat fondé par les Ibadites : ces membres d’une branche minoritaire de la religion musulmane, version quiétiste du kharidjisme, ont fui les persécutions dont ils étaient victimes de la part des califes Omeyyades dans le bas-Irak.
Dès cette époque, les princes arabes d’Oman établissent des comptoirs le long de la côte orientale de l’Afrique, de Mogadiscio à l’île de Pate (nord Kenya) et à Pemba (en 730), puis à Zanzibar (« rivage des Noirs » en arabe) et à Kilwa. Ils s’y livrent au commerce d’esclaves appelés « Zandj » (pour les distinguer des Abyssins de l’intérieur) jusqu’en Inde et en Chine. Politiquement, Oman est rattaché aux différentes puissantes qui contrôlent tour à tour la région (Perses, Qarmates, Bouyides, Seldjoukides…), jusqu’à l’émergence, en 1154, d’une dynastie autochtone, les Nabhânides, qui donnent un nouvel essor au commerce maritime. La prospérité qui en découle attire les Portugais qui prennent la ville de Mascate en 1507 et n’en seront chassés qu’en 1650. Dans la seconde moitié du XVIIe, les princes omanais reprennent également aux Portugais la région de Zanzibar. Ils bâtissent un Empire maritime qui s’étend jusqu’au Baloutchistan[1].
En 1744, une nouvelle dynastie accède au pouvoir, à l’issue d’une guerre entre tribus rivales : fondée par l’imam ibadite nouvellement élu, Ahmed ibn Saïd, elle règne toujours sur le sultanat. En 1840, la capitale de l’État passe à Zanzibar, dont la richesse, liée au commerce des esclaves et des clous de girofle, a supplanté celle de Mascate. Mais cette parenthèse est de courte durée puisque, en 1856, le sultanat est séparé en deux par les Britanniques (qui établissent un protectorat sur Zanzibar en 1890). En échange, Londres laisse le souverain Omanais s’emparer, en 1879, du Dhofar, vaste étendue désertique mitoyenne du Yémen qui se distingue, notamment, sur le plan linguistique (le djebali, « langue des montagnes » qui y est parlé est proche de l’amharique).
En 1891, un an après Zanzibar, l’ensemble du sultanat passe sous protectorat britannique, tout en conservant son indépendance et en évitant au maximum les contacts avec l’extérieur. Le soutien de Londres va s’avérer précieux, à plusieurs reprises, pour asseoir la victoire du sultan sur ses opposants, en 1913, puis en 1954-1959 : aidé par les Saoudiens, que l’existence du sultanat prive d’une ouverture sur la mer d’Oman, l’imam kharidjite soulève alors le djebel Akhdar, au nord du pays, en vue de créer son propre émirat pétrolier.
[1] Oman ne vendra son exclave baloutche de Gwadar au Pakistan qu’en 1958.
Une crise encore plus importante éclate en 1965, quand de jeunes Dhofaris, gagnés par les discours d’intellectuels de gauche arabes rencontrés en allant travailler à Manama ou à Koweït city, entrainent les tribus du Dhofar à se rebeller contre la tutelle du sultan. Soutenu par le sud-Yémen marxiste, la Chine et de jeunes nationalistes proche-orientaux, leur Front de libération du Dhofar progresse dans le nord du pays, malgré le soutien apporté par la Grande-Bretagne et la Jordanie au souverain omanais… qui est d’ailleurs déposé par son propre fils, Qabous, en 1970. Mettant en valeur les ressources pétrolières dont le pays dispose depuis 1967, le nouveau sultan parvient à retourner certaines unités rebelles – contre de l’argent et une amnistie – et à obtenir, à partir de 1973-74, le renfort d’une brigade de l’armée iranienne. La fin de la guerre est proclamée en décembre 1975, même si des combats sporadiques subsistent au Dhofar jusqu’en 1985. C’est depuis cette époque que, nonobstant le changement de régime survenu en 1979 à Téhéran, le sultanat d’Oman conserve une neutralité bienveillante vis-à-vis de l’Iran, jouant à l’occasion le rôle d’intermédiaire entre la théocratie chiite et les monarchies sunnites du Golfe.
Sur le plan géostratégique, le sultanat occupe une place majeure par rapport au détroit d’Ormuz, par lequel transitent 25 % du commerce mondial de gaz naturel liquéfié et un tiers du commerce mondial de pétrole. C’est en effet une exclave omanaise au sein des EAU, la péninsule de Moussandam, qui commande l’accès à ce détroit long de 45 km (et large de 38 km dans sa partie la plus étroite) entre mer d’Oman et golfe arabo-persique ; les eaux iraniennes étant peu profondes, la circulation des navires depuis la mer d’Oman se fait par deux étroits chenaux (de deux milles nautiques) situés entre des îlots omanais. Du fait des tensions entre Iraniens et pétromonarchies du Golfe, la navigation y est parfois délicate comme l’ont rappelé, en juin 2019, les explosions mystérieuses ayant touché deux pétroliers qui croisaient en mer d’Oman.
Ayant rompu avec la politique d’isolement de son père, Qabous a transféré la capitale du sultanat de Salalah, le grand port du Dhofar, à Mascate et profité des revenus générés par le pétrole pour doter le pays des grandes infrastructures qui lui faisaient défaut. Politiquement, il a concédé quelques ouvertures dans les années 1990, telles que la promulgation d’une Constitution en 1996 et l’octroi du droit de vote aux femmes l’année suivante. Mais, en février 2011, il n’échappe pas à la fièvre des « printemps arabes ». En dépit de fortes hausses du salaire minimum et d’aides accrues aux étudiants, des heurts meurtriers opposent les manifestants aux forces de l’ordre et le sultan doit se résoudre à opérer un remaniement gouvernemental sans précédent et à transférer une partie de ses pouvoirs législatifs aux deux chambres du Parlement, dont une seule est élue (l’autre étant nommée par le souverain). Bien qu’ayant procédé à quelques avancées (telles que l’instauration du suffrage universel en 2003), Oman continue à se caractériser par son immobilisme politique ; le sultan y cumule tous les pouvoirs : chef des armées et de la diplomatie, il nomme et démet les ministres et préside le gouvernement. Malgré les programmes lancés, dans les années 2000, pour dynamiser l’économie (commerce maritime, tourisme) et compenser une production pétrolière modeste, le pays reste encore sous-développé : le chômage des jeunes y avoisine les 30 %, les investisseurs recourant assez peu à une main d’œuvre locale qu’ils jugent insuffisamment formée.
Après un demi-siècle de règne, le sultan Qabous est décédé en janvier 2020. Sans enfants, il a été remplacé par un cousin qui a confirmé l’attachement du pays à sa position de neutralité diplomatique. Le pays en fait usage pour permettre à l’Iran et à l’Arabie saoudite d’annoncer, en mars 2023, la reprise de leurs relations diplomatiques.
Resté longtemps à l’abri des turbulences entre sunnites et chiites, le sultanat en est victime en juillet 2024 : un commando de l’organisation État islamique tue une demi-douzaine de personnes au voisinage d’une mosquée chiite de Mascate, fréquentée majoritairement par des immigrés du sous-continent indien.
Photo de une : La mosquée sultan Qabous à Mascate. Crédit : journaway Rundreisen / Unsplash