Comores (Union des)

Comores (Union des)

Depuis son indépendance, l’archipel vit au rythme des régimes autocratiques, coups d’État et sécessions de ses îles.

2 235 km²

République fédérale présidentielle

Capitale : Moroni

Monnaie : franc comorien

937 000 Comoriens

La diaspora compte au moins 300 000 personnes, à Mayotte et surtout à Marseille, première ville comorienne du monde.

Située au nord du canal du Mozambique, la fédération compte trois îles, possédant 340 km de côtes : la Grande Comore (Ngazidja, 1 146 km²) où siège la capitale, Moheli (Mwali, 424 km²) et Anjouan (Nzwani, 290 km²). Volcaniques, elles alternent collines, plateaux et montagnes (avec un sommet, toujours actif, à 2360 m à Ngazidja). Le climat est tropical.

L’Union revendique l’île méridionale de Mayotte, restée française (elle est représentée par la quatrième étoile sur le drapeau comorien), ainsi que l’archipel français des Glorieuses (7 km² inhabités) situé à l’est des Comores.

La population compte plusieurs communautés, souvent mélangées mais parfois rivales (antagonismes entre descendants arabes et Noirs) : Antalotse (métis d’Arabes et de Sakalaves malgaches), Cafres et Makoa (Bantous), Oimatsaha (Mélano-indonésiens)… Plus de 55 % de la population habite la Grande Comore et un peu moins de 40 % à Anjouan. Les langues officielles sont le shikomoro (groupe de dialectes des trois îles, voisin du swahili), le français et l’arabe.

Plus de 98 % de la population est musulmane (surtout sunnite).


Les Comores sont inhabitées quand des Bantous, venus des côtes africaines, s’y installent à partir du VIIIe siècle. Dans les siècles suivants les îles, en particulier Anjouan et Mayotte, entretiennent des liens avec Madagascar, distante de plus de 300 kilomètres. Vers 1470, elles voient s’implanter des « Chirazi » (originaires du golfe Arabo-Persique) et des Arabes (de l’Hadramaout, d’Oman), qui fondent des sultanats avec les élites locales et accélèrent le développement de l’islam sunnite de rite chaféite. La chute de Constantinople ayant conduit à la fermeture des routes commerciales entre l’Europe et l’Orient, la nouvelle voie empruntée pour commercer avec l’Inde et la Chine fait le tour de l’Afrique. Ceci fait la prospérité des côtes et des îles situées sur le canal de Mozambique, en particulier d’Anjouan.

Mais cette prospérité s’accompagne de rivalités entre les « sultans batailleurs » des quatre îles, qui se livrent à de nombreuses razzias et guerres ouvertes. Elle attire aussi la convoitise de rois malgaches. C’est l’un d’eux, le Sakalave Andriantsoly, qui vend son royaume de Mayotte à la France, en 1841, afin de protéger l’île de ses voisins. Les trois autres îles demeurent indépendantes, mais elles sont divisées et considérablement affaiblies, dès que l’ouverture du canal de Suez (en 1869) met fin à la nécessité de contourner l’Afrique. En 1886, un des onze sultans de la Grande Comore unifie l’île, mais c’est avec l’aide de la France, qui lui fait signer un traité de protection. Le protectorat s’impose progressivement aux trois îles (traités de 1886, 1887 et 1892), l’ensemble étant d’abord rattaché à Mayotte (en 1904), puis à Madagascar, avant de devenir territoire d’outre-mer en 1946. C’est la première fois que l’ensemble de l’archipel est uni au sein d’une même entité territoriale.

En 1961, les Comores obtiennent un statut d’autonomie interne suivi, cinq ans plus tard, du transfert de la capitale territoriale de Dzaoudzi (à Mayotte) à Moroni, sur la Grande Comore, ce qui provoque la rancœur des Mahorais. Les îles restant inscrites sur la liste des territoires devant accéder à l’autodétermination, selon l’ONU, la France y organise un référendum sur l’indépendance, en 1974 : le « oui » l’emporte à plus de 90 % dans l’archipel… mais pas à Mayotte, qui demeure française (le « non » y ayant obtenu près de 64 %), au grand dam de la République des Comores, que l’Anjouanais Ahmed Abdallah a proclamée unilatéralement en 1975.


La situation dans le nouvel État est instable dès les premiers mois de son indépendance. A peine élu, le Président Abdallah est renversé par l’opposition de gauche emmenée par Ali Soilih, favorable à de meilleures relations avec la France. Ce n’est que le premier de la vingtaine de coups d’État, réussis ou ratés, que va connaître le pays. Réfugié sur son île d’Anjouan, le chef d’État déchu est capturé par le mercenaire français Bob Denard et emmené en France. Au pouvoir, Soilih instaure un régime marxiste qui entreprend de « moderniser » à tout prix la société comorienne, fût-ce sous la contrainte. Lorsque le nouveau Président commence, lui aussi, à demander que la France restitue Mayotte, Denard et les services de renseignement français organisent un nouveau coup d’État : mieux disposé à l’égard de la France depuis son exil, Abdallah est rétabli et Soilih abattu en mai 1978. Denard assure la sécurité du régime, à la tête d’une garde présidentielle financée par l’Afrique du sud blanche. Ayant proclamé une République fédérale islamique des Comores, Abdallah exerce un pouvoir de plus en plus autocratique, ce qui lui vaut d’être assassiné en 1989. Sous la pression de Paris et Pretoria, les mercenaires doivent quitter l’archipel .

Le nouveau pouvoir étant fragile, Denard renverse le Président Djohar en 1995, mais son coup d’État échoue, à la suite d’une intervention de l’armée française. Deux ans plus tard, Moheli et Anjouan font sécession. La première revient rapidement dans le giron comorien, sous la pression de l’Organisation de l’unité africaine, mais pas la seconde, dont les dirigeants sont divisés. La situation se débloque lorsque le colonel Azali Assoumani s’empare du pouvoir sur la Grande Comore, en 1999, et engage des négociations avec le colonel Mohamed Bacar, qui a pris le dessus sur ses rivaux à Anjouan. Les discussions aboutissent, en 2001, à la signature des accords de Fomboni qui instaurent une république fédérale, l’Union des Comores, dans laquelle chaque île conservera un gouvernement régional ; en outre, la présidence de la Fédération tournera, tous les cinq ans, entre chacune des îles. Le premier mandat est exercé par Azali, à l’issue d’un scrutin boycotté par ses deux principaux adversaires et marqué par des incidents à Moroni et des fraudes : le vainqueur aurait obtenu 100 % des voix de la Grande Comore !

En 2006, l’élection présidentielle est remportée par un chef d’entreprise et guide religieux, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, originaire d’Anjouan. Son pouvoir n’en est pas moins contesté par Bacar qui, en juin 2007, proclame de nouveau l’indépendance Anjouanaise. L’armée comorienne y met fin en mars 2008, avec l’aide de l’Union africaine (UA). L’année suivante, Sambi fait voter une nouvelle Constitution qui renforce le pouvoir du Président fédéral par rapport aux « gouverneurs » des îles. Prédicateur formé à Qom, en Iran, le Président fait par ailleurs de l’islam la religion d’État. Ayant prolongé son mandat d’un an, il est remplacé en 2012 par son vice-Président – originaire de Moheli – qui a remporté l’élection présidentielle.

En 2016, date du retour au pouvoir d’un représentant de la Grande Comore, le scrutin est remporté par l’ancien putschiste Azali, avec un peu plus de 41 % des suffrages, contre un peu moins de 40 % à son principal rival. En 2018, il fait adopter, par un référendum que boycotte l’opposition, une nouvelle Constitution : elle autorise le Président sortant à briguer un second mandat consécutif, supprime le poste de vice-Président et abolit la rotation tournante de la présidence fédérale. Azali est réélu en 2019, à l’issue d’un scrutin marqué par le saccage de bureaux de vote et des affrontements avec les forces de l’ordre, l’opposition dénonçant de multiples fraudes. En novembre 2022, l’ancien Président Sambi, devenu le premier opposant au régime, est condamné à la prison à perpétuité pour « haute trahison », sans appel possible : en 2008, il avait fait voter une loi permettant d’acheter la nationalité comorienne, afin de renflouer les caisses du pays, la mesure visant en priorité les bédouins du Golfe arabo-persique, citoyens de seconde zone dans leurs pays. Azali est réélu en janvier 2024, avec près de 63 % des voix dès le premier tour, mais sans doute moins de 17 % de participation (bien que le chiffre ait été revu à plus de 50 %). C’est son troisième mandat, mais le chef d’État argue que la Constitution a remis les compteurs à zéro.

En septembre, il est légèrement blessé dans une attaque à l’arme blanche. Interpelé, son jeune agresseur meurt en prison, dans des conditions suspectes.