Qatar

Qatar

Fort de ses richesses gazières, l’émirat a acquis un rôle international bien supérieur à son poids démographique.

11 586 km2

Monarchie absolue

Capitale : Doha

Monnaie : riyal qatarien

2,8 millions d’habitants dont un peu plus de 300 000 Qatari(en)s.

Péninsule désertique de 160 km de longueur sur 80 km dans sa plus grande largeur, le Qatar compte un peu plus de 560 km de côtes sur le golfe Persique et 60 km de frontière terrestre avec l’Arabie saoudite au sud. Les îles bahreïnies d’Hawar sont situées à une encablure de sa côte occidentale.

L’immense majorité de la population est immigrée, venues d’autres pays arabes, du sous-continent indien et du sud-est asiatique. 78 % des habitants sont musulmans (47 % wahhabites), 9 % hindous et 8,5 % chrétiens.


Comme le Bahreïn, le Qatar refuse le plan britannique d’une Fédération unique avec les futurs Émirats arabes unis et proclame son indépendance en 1971. Dès l’année suivante, l’émir au pouvoir est évincé par un de ses cousins, lequel est lui-même déposé par son fils, en juin 1995. Le nouveau souverain, cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani (qui abdiquera en 2013 en faveur de son fils), se distingue par plusieurs initiatives, en faveur des femmes (premier État de la région à en nommer une dans un gouvernement), d’une démocratie relative (en mars 1999, premières élections au suffrage universel, femmes comprises, pour désigner les vingt-neuf membres d’un Conseil ayant autorité sur les municipalités) et en matière de « soft power » (financement de la chaîne satellitaire Al Jazira, dont la liberté de ton provoque des incidents avec les pays voisins du pays, investissements multiples dans le sport de haut niveau…).

Dans le domaine diplomatique, le Qatar apporte également un soutien financier et militaire à certains acteurs de conflits armés, souvent liés aux Frères musulmans (en Syrie, Libye, Palestine, Égypte…) : le pays est en effet devenu le parrain du mouvement, depuis que l’Arabie Saoudite a cessé de le soutenir, en raison du soutien qu’il avait apporté à l’invasion du Koweït par l’Irak en 1991. Cette divergence de vues a conduit Riyad et ses alliés (dont Bahreïn et les EAU) à rompre, en juin 2017, toute relation avec le Qatar, accusé de soutenir le terrorisme islamiste et de faire preuve de complaisance avec le régime iranien. De fait, Doha a rétabli, deux mois plus tard, ses relations diplomatiques avec l’Iran, relations qui avaient été interrompues à la suite d’une vague de violences anti-saoudiennes survenue en janvier 2016 à Téhéran.

Le maintien de bonnes relations avec l’Iran est notamment dicté par des considérations économiques : les deux pays partagent le plus grand champ gazier du monde et le régime iranien a la faculté de contrôler, donc de bloquer, le détroit d’Ormuz (entre le Golfe arabo-persique et la mer d’Oman) par lequel transitent 25 % de la consommation mondiale de gaz naturel liquéfié et un tiers de la consommation mondiale de pétrole.

Ce positionnement n’empêche pas le Qatar de rester un important client de l’industrie de défense américaine et d’héberger une des structures déployées dans la région par les États-Unis après leurs guerres en Irak, en l’occurrence le siège de l’US Centcom [le commandement militaire américain pour l’Asie centrale et le Moyen-Orient]. D’ailleurs, les Américains poussent pour que l’émirat et leurs autres alliés régionaux s’unissent face à un régime iranien qui reprend l’enrichissement à des fins militaires de son uranium. En janvier 2021, le médiateur koweïtien annonce la réouverture de l’espace aérien, ainsi que des frontières terrestres et maritimes, entre le Qatar et l’Arabie saoudite. N’ayant accédé à aucune des exigences majeures de Riyad durant le blocus, l’émir qatari assiste même au sommet du Conseil de coopération du Golfe, qui se tient en Arabie saoudite, et signe avec les cinq autres membres du CCG un accord de « solidarité et de stabilité ».

En octobre 2021, l’émirat organise les premières élections au suffrage universel de son Parlement, le Majlis Al-Choura, qui peut voter le budget, proposer des lois et même démettre les ministres. Ce scrutin est toutefois très encadré : non seulement le souverain nomme encore un tiers des députés, mais le corps électoral a été restreint aux seuls Qataris pouvant justifier que leur famille était présente dans le pays avant 1930 ; la mesure exclut nombre d’immigrants naturalisés, mais aussi l’importante tribu semi-nomade des Al-Murra, jugée trop favorable aux intérêts saoudiens et émiratis[1]. En décembre, la normalisation des relations avec Riyad se traduit par la visite officielle du prince héritier saoudien à Doha. Le Qatar se rapproche également de l’Égypte ainsi que des États-Unis, alors que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis s’en éloignent quelque peu, en particulier lors de la crise internationale provoquée par l’invasion russe de l’Ukraine.

Un an plus tard, alors que s’achève la Coupe du monde de football organisée sur son sol, le Qatar est accusé d’avoir acheté plusieurs députés du Parlement européen, dont sa vice-présidente grecque : de l’argent leur aurait été versé pour défendre l’image de l’émirat, accusé notamment d’avoir négligé la sécurité des travailleurs immigrés chargés de construire ses stades. Mais l’affaire n’entache en rien le crédit diplomatique de l’émirat, qui joue les intermédiaires entre le Hamas et Israël, et même entre le Venezuela et les États-Unis. En décembre 2023, ces derniers obtiennent – en toute discrétion – le droit d’utiliser dix ans de plus l’importante base d’Al Udeid, construite en 1996.

[1] Trois de ses membres, qui avaient trop contesté cette exclusion, sont condamnés à la prison à perpétuité en mai 2022.

Crédit photo : mike-swigunski / Unsplash