ASIE, Asie centrale

La Caspienne, des eaux disputées

Cinq pays se disputent la plus vaste étendue d’eau fermée au monde (360 000 km²), riche en pétrole, en gaz naturel et en esturgeons pour le caviar.

La disparition de l’URSS a fait voler en éclats le cadre juridique instauré par la signature de deux traités soviéto-iraniens, en 1921 et 1940 : l’exploitation y avait été définie comme commune, avec un droit de veto pour chacun des deux signataires. Non seulement la dislocation de l’Union soviétique a mis fin à ce statut de cogestion, mais elle a fait passer de deux à cinq le nombre de pays se disputant une zone riche en hydrocarbures et en ressources halieutiques. Dans ce nouveau contexte, Téhéran revendique un partage égalitaire entre riverains (20 % chacun), alors qu’une attribution au prorata des côtes (prôné par la Russie, l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan) ne lui en laisserait que 12 %. Quant au Turkménistan, qui ménage ses relations avec l’Iran, il plaide pour que la Caspienne ne soit pas considérée comme un lac mais comme une mer, ce qui, en vertu de la loi maritime internationale de 1982, instaurerait des eaux territoriales de douze milles pour chaque État… et ferait de la Volga et des canaux alimentant la Caspienne des voies d’eau internationales ! La situation est aggravée par le fait que, dans la partie méridionale de la mer, les frontières entre le Turkménistan, l’Azerbaïdjan et l’Iran sont mal délimitées.

Un accord fragile a été trouvé en août 2018 à Aktaou (Kazakhstan) ; ni lac, ni mer, la Caspienne bénéficiera d’un statut spécial « d’objet liquide », permettant de donner un cadre juridique au traitement des contentieux qui demeurent pendants, puisqu’aucun mécanisme de partage des richesses n’est instauré par l’accord. Ainsi, si l’exploitation des ressources offshore en hydrocarbures est bien établie pour la partie nord, les règles restent à définir pour celles de la partie sud, la plus profonde. En pratique, la « Convention » prévoit la définition d’eaux territoriales (sur lesquelles s’étend la souveraineté de l’État côtier), en fonction de la longueur de côtes de chaque État, jusqu’à quinze milles nautiques maximum (27,8 km) à l’intérieur de la mer. À cela viendrait s’ajouter une zone adjacente de pêche de dix milles nautiques (18,5 km) supplémentaires. Le reste de la Caspienne, la plus grande partie, est préservé en tant que zone commune.

La convention pourrait, notamment, permettre de réaliser le gazoduc transcaspien (entre Turkmenbachy et Bakou) qui livrerait du gaz à l’Union européenne, sans passer par le sol russe, la rentabilité de cet équipement étant toutefois sujette à caution. A cette réserve près, Moscou apparaît comme le principal bénéficiaire de l’accord, puisqu’il interdit l’accès à la Caspienne à toute force navale autre que celles des riverains.

Image : la Caspienne à Bakou. Crédit : royamehralizada / Pixabay

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