Fidji

Fidji

Depuis l’indépendance, la vie de l’archipel est parasitée par les relations entre autochtones Mélanésiens et Indo-Fidjiens.

18 274 km²

République parlementaire membre du Commonwealth

Capitale : Suva

Monnaie : dollar fidjien

952 000 Fidjiens

Situé entre le Vanuatu (au nord-ouest) et les Tonga (au sud-est), l’archipel mélanésien compte 332 îles et plus de 500 îlots, représentant 1 129 km de côtes sur l’océan Pacifique. Une centaine des îles sont habitées dont la plus grande, Viti Levu (10 388 km²), concentre plus de 70 % de la population. Les Fidji comprennent aussi le petit archipel de Rotuma (46 km²) situé 465 km au nord. Couvertes de forêts, les îles sont montagneuses (avec un point culminant à 1 300 m). Le climat est tropical.

Environ 57 % de la population sont iTaukei (le nom donné, depuis 2010 aux natifs de l’île, le terme Fidjien qualifiant les citoyens du pays) ; ils sont Mélanésiens avec un apport polynésien. Environ 38 % des habitants sont Indo-Fidjiens. S’y ajoutent diverses minorités, dont les 2 000 Rotumiens, plus proches du monde polynésien que mélanésien. Les langues officielles sont le fidjien, l’anglais et l’hindi des Fidji. 64 % de la population est chrétienne (à 45 % protestante, principalement méthodiste). Les hindouistes sont 28 % et les musulmans 6 %.

L’hindi des Fidji provient de langues parlées dans le nord de l’Inde et le Népal (l’awadhi et le bhodjpouri, parlé aussi par la diaspora des Guyane, de Trinité-Tobago et de Maurice).


Les Fidji sont peuplées par des Austronésiens venus d’Asie orientale aux environs de l’an 1000 AEC. Au premier siècle de l’ère commune, ils sont suivis par des vagues successives de Mélanésiens, qui entretiennent des relations commerciales et se mélangent avec les Polynésiens des Samoa et des Tonga voisines. Au Xe siècle, les Fidjiens entrent dans la sphère d’influence de l’Empire Tu’i Tonga, jusqu’à son déclin à partir de 1200.

Les premiers Européens abordent dans les îles en 1643. Dans les années 1800, elles deviennent fréquentées par des commerçants, missionnaires et chasseurs de baleines, acteurs qui interviennent, le cas échéant, dans les guerres que se livrent les différentes tribus. En 1865, le chef suprême de la petite île de Bau, Seru Epenisa Cakobau, parvient à unifier plusieurs groupes au sein d’une Confédération des royaumes indépendants de Viti. L’alliance étant fragile, Cakobau tente de centraliser son pouvoir en se déclarant Tui Viti (roi des Fidji) en 1871. Mais sa situation reste précaire : contesté par certains chefs autochtones et certains colons européens, le souverain fait également l’objet de menaces des États-Unis. Pour y mettre fin, lui et plusieurs grands chefs traditionnels cèdent le royaume à la Grande-Bretagne en 1874. Pour échapper à l’influence des Tonga, les dirigeants coutumiers de Rotuma font de même sept ans plus tard.

Le gouverneur de ce qui est désormais une colonie britannique développe les plantations, notamment de canne à sucre et de café, et fait venir à cette fin plusieurs dizaines de milliers de travailleurs des Indes, dont beaucoup choisissent de rester dans l’archipel à la fin de leur contrat. Au début du XXe siècle, la société est divisée en trois catégories qui vivent dans des espaces séparés, en conservant leurs langues et leurs coutumes : les autochtones Fidjiens, les Européens et les Indiens.


A l’indépendance, en 1970, des accords sont conclus pour que les sièges au Parlement soient pourvus en fonction du poids de chaque groupe ethnique : 25 députés sont élus au suffrage universel intégral, 23 uniquement par les électeurs natifs des Fidji, 19 par les électeurs « Indo-fidjiens », 1 par les autochtones de Rotuma et 3 par l’ensemble des électeurs appartenant aux autres catégories ethniques (« Européens », « Chinois »…). Mais la question du poids des Indo-Fidjiens demeure un sujet sensible, dans un pays où ils ont un moment été plus nombreux que les autochtones. En 1987, deux coups d’État menés par le général Rabuka renversent des gouvernements jugés trop proches de la communauté indienne. Le second abolit la monarchie et proclame la république, dont le Président est élu par le Conseil des grands chefs. Le nouveau régime élabore également une nouvelle Constitution : entrée en vigueur en 1990, elle renforce le contrôle des autochtones sur la vie politique et économique locale, ce qui provoque l’exode de milliers d’Indo-Fidjiens, qui ne sont pas propriétaires des terres qu’ils cultivent, et affaiblit l’économie du pays.

En 1997, Rabuka revient à de meilleurs sentiments et fait adopter une nouvelle Constitution, la troisième, qui rétablit davantage d’équité entre les communautés. Deux ans plus tard, à l’issue d’élections libres, le poste de Premier ministre revient même à un représentant de la communauté indienne. Bien que majoritaire, il ouvre son gouvernement à deux formations fidjiennes, ce qui ne m’empêche pas d’être renversé dès l’année suivante par un nouveau coup d’État, perpétré par la milice d’un homme d’affaires autochtone. La situation est dénouée par le chef de l’armée, « Frank » Bainimarama, qui s’empare du pouvoir en mai 2000 : l’affairiste putschiste est emprisonné et un nouveau gouvernement formé, non pas par le Premier ministre renversé, mais par un banquier et politicien mélanésien, qui est formellement élu en 2001. Réélu en 2006, Laisenia Qarase est renversé, à la fin de la même année, par Bainimarama qui – bien qu’autochtone lui-même – accuse le Premier ministre d’attiser les tensions communautaires, en pratiquant une discrimination positive vis-à-vis des natifs de Fidji et en envisageant de gracier les putschistes de 2000. Le coup d’État vaut aux Fidji d’être temporairement suspendues du Commonwealth.

Autoproclamé Premier ministre, le contre-amiral le devient formellement en 2014, avant d’être réélu quatre ans plus tard. Les élections sont jugées crédibles, même si l’homme fort du pays ne dédaigne pas de recourir à la justice pour écarter des opposants. En 2013, une nouvelle Constitution met fin aux politiques fondées sur les clivages inter-ethniques et remplace les listes électorales communautaires par des listes sans aucune distinction. Devenu monocaméral, le Parlement élit le Premier ministre et le Président de la république (poste essentiellement honorifique). Au niveau international, les Fidji mettent fin à leur alignement pro-Occidental, sur fond de brouille avec les grands voisins australien et néo-zélandais. En novembre 2018, le pays signe un accord de coopération avec la Chine et intègre les « nouvelles routes de la soie » chinoises.

Après les législatives de décembre 2022, le parti de Bainimarama, Fidji d’abord, doit céder le pouvoir à la coalition de l’opposition réunissant le parti historique des Indo-Fidjiens (la Fédération nationale) et deux formations nationalistes fidjiennes, le Sodelpa (héritier du parti de Qarase) et l’Alliance populaire de l’ancien putschiste Rabuka, qui prend la tête du nouveau gouvernement. Ayant annoncé son intention de distendre les liens avec la Chine, il se rapproche de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et de l’Inde, arguant que les « systèmes démocratique et judiciaire (des deux États) étaient trop éloignés ». En pratique, l’archipel rééquilibre ses positions : après avoir signé avec un Pékin, en août 2024, un accord sur l’aide militaire, le commerce, et même l’enseignement du chinois dans les écoles, il en signe un avec les États-Unis en novembre suivant, prévoyant notamment des exercices militaires communs.