Au début du XIe siècle, la côte nord des actuels Sénégal et Gambie est colonisée par les Wolof, tandis que les Sérère s’implantent dans la vallée du fleuve Sénégal, dont l’embouchure est occupée, depuis le IXe, par le royaume Peul (Toucouleur) de Tekrour. Repoussés au sud par ces envahisseurs, les autochtones Baïnouk constituent le royaume du Kassanla, formé de vastes provinces qui s’étendent du sud du fleuve Gambie jusqu’à la Casamance. Leur territoire est bordé par les États d’autres peuples locaux : les royaumes Felupe/Diola, Manjak, Brâmes/Pepel, la confédération Balante dans les mangroves et le royaume Beafada de Kinara (dont l’aristocratie est d’origine mandingue et le peuple d’origine Landuma). Dans la première moitié du même siècle, la Guinée voit arriver des Soninké, peuple du groupe Mandé qui a fondé l’Empire du Ghana et le royaume de Diarra (cf. Sahel).
Dans le premier tiers du XIIIe siècle, l’affaiblissement du Ghana pousse un autre peuple Mandé, les Soussou, à s’en emparer. Mais leur conquête est freinée par Soundiata Keita, un autre Mandé qui va fonder l’Empire du Mali. Vaincus, les Soussou s’enfuient le long du fleuve Gambie et vers le massif guinéen du Fouta Djalon, où se situent les sources du Sénégal, de la Gambie et du Tinkisso, affluent du Niger. D’autres Mandé migreront un peu plus tard en direction de zones peu peuplées : au XIVe, voire avant, des chefferies Mandingues se forment le long du fleuve Gambie et, au XVe, des migrants Mandé participent à la formation des royaumes de Sine et Saloum dans ce delta de mangroves, peuplé de Sérères, qui longe le nord de la Gambie. Plus au sud, les autochtones demeurent indépendants, qu’il s’agisse des Diola de basse Casamance ou des Manjak, Papel et Balante de l’actuelle Guinée-Bissau. Un peu plus à l’est, d’autres Mandé conquièrent l’intérieur forestier de la Sierra-Léone au XVIe siècle et y prennent le nom de Mendé (avec un « e »).
En 1250, l’est du royaume Baïnouk est colonisé par l’Empire du Mali et l’ouest vassalisé, après la défaite de son roi face au général mandingue Tiramighan Traoré. Un autre État connait le même sort : le royaume Dyolof, fondé par le clan Wolof des N’Diaye sur la partie méridionale du Tekrour, au tournant des XIIe et XIIIe siècles. Mais il s’affranchit de cette emprise et s’impose comme puissance régionale : il englobe progressivement les États littoraux du Cayor, du Baol, du Sine et du Saloum, ainsi que le Waalo (centré sur le delta du fleuve Sénégal, à cheval sur le sud mauritanien) et une partie de la région montagneuse et aurifère du Bambouk, région Mandingue aujourd’hui partagée entre le Sénégal et le Mali.
A partir du siècle suivant, les puissances européennes commencent à s’intéresser aux côtes du Sénégal, fort bien situées pour envoyer l’or africain vers l’Europe et pour expédier des esclaves en l’Amérique, grâce aux populations que les royaumes de l’intérieur razzient lors des guerres régulières qu’ils se livrent. Les Européens les plus présents au départ sont les Portugais : ils sont au Cap Vert et dans l’île de Gorée en 1445, en Guinée Bissau l’année suivante, en Gambie et en Guinée en 1482. Vingt ans plus tôt, ils ont découvert une rade idéalement protégée par une péninsule : la future Freetown en Sierra Léone.
Le XVe siècle est également marqué par la migration de nombreux pasteurs Peuls au Fouta-Djalon et dans l’actuelle Guinée. A la fin du siècle, ceux du haut-Sénégal fondent l’Etat islamo-animiste du Fouta-Toro, sur les terres de l’ex-Tekrour. Tombé dans l’orbite de l’Empire Songhaï au début du XVIe siècle (cf. Sahel), il passe ensuite aux mains de la dynastie peule des Denianké. De son côté, le royaume unitaire des Wolof se désintègre en quatre royaumes au milieu du XVIe (Dyolof à l’intérieur, Walo, Cayor et Baol sur la côte du nord au sud), ce qui permet au Sine, au Saloum et au Waalo de recouvrer leur indépendance. Tous prospèrent dans le trafic d’esclaves avec des Européens de plus en plus présents. En 1617, les Hollandais érigent un fort à Gorée, qu’ils doivent céder soixante ans plus tard aux Français, lesquels se sont établis, en 1637, à l’embouchure du fleuve Sénégal où ils vont fonder la ville de Saint-Louis. Les Portugais établissent des comptoirs à Ziguinchor, Cacheu et Bissau, pour faire commerce d’esclaves et de gomme. De leur côté, les Britanniques s’installent sur l’île Saint-James du fleuve Gambie (1661) et entrent en relations avec le roi des Temné, un peuple arrivé en Sierra-Léone au XVIe siècle, pour établir un poste commercial près de l’actuelle Freetown.
Plus à l’est, les Européens donnent le nom de Côte des graines au littoral situé entre Monrovia et Abidjan, en référence à une épice poivrée qui y pousse. L’intérieur, couvert de forêt dense est habité par les Krou, population n’ayant jamais fondé d’État, et par une mosaïque de peuples autochtones et de migrants du groupe Mandé. Des bandes armées du pays Malinké, les Mané, y fondent un royaume qui se désagrège en petites chefferies dès le XVIIe. A la même période, les mansaya (baronnies de l’empire du Mali) de l’ancien royaume Baïnouk se regroupent pour former le royaume du Gabou (ou Kaabunké) qui s’étend sur des régions riveraines du fleuve Gambie : une partie de la Casamance, le nord de l’actuelle Guinée-Bissau (sauf la côte) et l’ouest de l’actuelle Guinée-Conakry. Il exerce, jusqu’au XVIIIe siècle, une forte influence sur les autres nations de la région (Royaume de Qinala, Confédération Balante, Seigneuries Brâmes/Papel, Seigneuries Felups/Diola, Royaume Nalu).
Au tournant des XVIIe et XVIIIe, la confrérie soufie Qadiriyya lance un djihad qui rencontre un fort succès chez les peuples déshérités de la région, tels que les Toucouleurs. A la fin du XVIIe naît la théocratie musulmane du Boundou, au sud-est du Sénégal . Elle est suivie, en 1725, de l’imamat du Fouta-Djalon, qui se livre à d’intenses activités esclavagistes, pour le travail local de la terre ou pour la traite transatlantique. Pour y échapper, les Soussou animistes s’enfuient vers la côte. Dans les années 1770, la dynastie islamo-animiste du Fouta-Toro est renversée par un mouvement d’obédience strictement islamique qui est vaincu, en 1796, par les Wolof du Cayor, soutenus par les Français.
En 1787, après la guerre d’indépendance Américaine, la Sierra Leone devient une destination pour les Noirs américains restés fidèles aux Britanniques. Mais, ce sont surtout d’anciens esclaves ayant fui les États-Unis, ou venant de Jamaïque, qui donnent vie à Freetown quelques années plus tard. Lorsque Londres abolit le commerce esclavagiste, en 1807, des milliers d’esclaves libérés sont transportés en bateau jusqu’en Sierra Leone, dont l’arrière-pays est colonisé à l’extrême fin du XIXe siècle. L’ensemble constitue une colonie britannique, à la différence du territoire voisin qui sert, lui aussi, à accueillir des esclaves libérés, mais qui devient indépendant, en 1847, sous le nom de Liberia.
Plus au nord, la France a récupéré, en 1815, les possessions sénégalaises qu’elle avait dû céder quelques années aux Britanniques. Elle prend possession de l’intérieur du pays sous l’impulsion du général Faidherbe, nommé gouverneur en 1854. D’abord le long du fleuve Sénégal, où il fait construire des forts et dont il chasse les Maures de la rive sud, en s’emparant du Waalo, l’arrière-pays de Saint-Louis. Il prend ensuite le contrôle de l’entrée de la Casamance. Pour suppléer ses troupes dans leur opération colonisatrice, Faidherbe a créé, en 1857, un corps de soldats autochtones, les tirailleurs sénégalais. Ses successeurs poursuivent son action : d’abord placés sous protectorat, les royaumes sénégalais – Fouta-Toro compris – sont annexés entre 1885 et 1895, le Bambouk soumis en 1887, le Boundou en 1890 et l’intérieur de la Casamance pacifié au début du XXe siècle. En revanche, Paris et Londres n’ayant pas réussi à s’entendre sur un échange de territoires, Bathurst et la colonie britannique de Gambie restent enclavés dans le Sénégal français, les frontières étant arrêtées en 1889. Celles avec Bissau et la Guinée portugaise sont fixées en 1886 et avec la Sierra Leone en 1895. L’année suivante, la France soumet le Fouta-Djalon qui, en 1867, avait défait les armées du royaume de Gabou. En 1898, les troupes françaises capturent le chef de guerre Samory Touré, dont la tentative de restauration d’un grand empire Malinké (cf. Sahel) l’avait conduit jusque dans l’arrière-pays de Freetown. La conquête française de la Guinée est plus longue. Amorcée par la création de trois postes sur le littoral en 1865-1866 (les « Rivières du sud »), elle ne prend fin qu’en 1911, avec la mainmise sur les zones forestières limitrophes du Liberia.
En 1895, Paris décide de regrouper toutes ses colonies ouest-africaines, soit 4,7 millions de km², au sein de l’Afrique occidentale française (AOF). Bien que ce domaine s’étende jusqu’au Niger et au Dahomey, la capitale est excentrée à Dakar. A l’exception des habitants de quatre communes sénégalaises et d’un certain nombre de chefs et de fonctionnaires locaux, la quasi-totalité des autochtones n’a pas la citoyenneté française et est soumise au régime de l’indigénat qui prévoit, entre autres, la soumission au travail forcé. Celui-ci est aboli à partir de 1946, en même temps que se développe la représentation des Africains au sein de la classe politique et de l’administration. La même année, plusieurs dirigeants créent le Rassemblement démocratique africain, qui se divise rapidement entre partisans du fédéralisme (comme le Sénégalais Léopold Sédar Senghor) et tenants d’une autonomie accrue des Territoires d’outre-mer (comme l’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny). Adoptée en 1956, cette seconde voie est prolongée, deux ans plus tard, par la création d’une Communauté d’États membres, dont la France assure la diplomatie, la défense et la politique monétaire. Ce dispositif est adopté, par référendum, par l’ensemble des territoires, à l’exception de la Guinée qui accède aussitôt à l’indépendance. Les autres pays deviennent souverains en 1960, quelques années avant la Sierra Leone (1961), la Gambie (1965) et la Guinée-Bissau (1974).