272 967 km2
République militaire
Capitale : Ouagadougou
Monnaie : franc CFA
22,5 millions de Burkinabé[1]
[2] Mixage du dioula Faso (terre) et du moré Burkina (intégrité, honneur), le nom a remplacé celui de Haute-Volta en 1984.
Totalement enclavé, le Burkina Faso (« patrie des hommes intègres[2]« ) compte un peu plus de 3 600 km de frontières terrestres avec six pays : le Mali (plus de 1 300 km) au nord et à l’ouest, le Niger (plus de 620 km) à l’est, la Côte d’Ivoire (plus de 540 km), le Ghana (plus de 600 km), le Togo (un peu plus de 130 km) et le Bénin (près de 390 km) du sud-ouest au sud-est. Le Burkina et le Bénin se disputent, pacifiquement, les 68 km² de la zone de Koalou/Kourou, déclarée neutre en attendant un arbitrage international.
D’une altitude moyenne inférieure à 400 mètres, le territoire est composé d’un plateau de savanes (et quelques forêts au sud) et de collines, avec un point culminant à moins de 750 m au sud-ouest. Il est traversé par trois cours d’eau qui lui ont donné son nom colonial de Haute-Volta : le Nakambé (Volta Blanche), le Nazinon (Volta Rouge) et le Mouhoun (ex-Volta Noire), seul cours d’eau permanent avec la Comoé qui coule au sud-ouest. Le lac Volta se situe plus au sud, au Ghana. Le climat est de type tropical dans la moitié méridionale et semi-aride, voire aride, dans la partie sahélienne au nord.
Un peu plus de la moitié de la population (52 %) est d’ethnie Mossi : parlant la langue moré, ils vivent principalement au centre du pays. L’autre moitié se répartit en une soixantaine d’ethnies dont les plus importantes sont les Peuls (ou Fulani 8 %, dans le nord), les Gourmantché « cousins » des Mossis (7% à l’est), les Bobos, les Gourounsi et les Senoufo (4 à 5 % chacune), les Bissa (moins de 4 %), les Lobis, les Dagara et les Touareg/Bella (autour de 2 % chacun)… Depuis 2023, les langues officielles sont le moré, le fulfuldé (peul), le gourmantché et le dioula, langue mandingue proche du bambara (cf. Mali) très pratiquée à Bobo-Dioulasso et dans l’ouest.
Plus de 60 % des Burkinabé sont musulmans, très majoritairement sunnites. Les chrétiens sont entre 23 et 30 % (aux deux tiers catholiques) et les animistes entre 6 et 15 %.
Utilisée par le colonisateur français comme réservoir de main d’œuvre pour ses territoires de Côte d’Ivoire, la Haute-Volta devient indépendante en 1960, sous la forme d’une république, l’empereur des Mossis (le Mora Naba) ayant échoué à instaurer une monarchie constitutionnelle deux ans plus tôt. Le Président élu, Maurice Yaméogo, est lui-même un Mossi, fils de paysan, qui fait de sa formation un parti unique (l’Union démocratique voltaïque-Rassemblement démocratique africain) et instaure un régime de plus en plus autoritaire, y compris sur la scène diplomatique. Il se montre en particulier hostile à la Fédération du Mali que la France projette de créer avec une partie de ses colonies d’Afrique de l’ouest (dont la Haute-Volta qui, entre 1932 et 1947, a été formellement administrée par ce qu’on appelle alors le Soudan français, sauf la partie occidentale rattachée à la Côte d’Ivoire). Dès 1959, Yaméogo a pris les devants et suscité une alliance essentiellement économique, le Conseil de l’Entente, qui l’associe à ses homologues de Côte d’Ivoire, du Niger et du Dahomey (futur Bénin).
En janvier 1966, le régime ne peut empêcher les syndicats, pourtant interdits, de décréter une grève générale de protestation contre la dégradation des conditions de vie dans le pays. Incapable de reprendre la situation en main, Yaméogo doit abandonner le pouvoir au chef de l’armée, le colonel Lamizana. Devenu chef de l’État, ce dernier fait modifier la Constitution, une première fois en sa faveur en 1970, puis une seconde sept ans plus tard, à la suite d’un conflit institutionnel. Le nouveau texte ayant instauré le multipartisme, une élection pluraliste se tient en 1978. Lamizana l’emporte au second tour, mais il est déposé en 1980, après des grèves ayant paralysé le pays. Le chef des putschistes, jusqu’alors ministre des Affaires étrangères, devient le nouvel homme fort du pays, jusqu’à sa propre destitution deux ans plus tard, par d’autres militaires conduits par Jean-Baptiste Ouédraogo.
Sa présidence à la tête du Comité de salut du peuple ne dure pas. Entré en conflit avec son Premier ministre, le capitaine Thomas Sankara, il le limoge en avril 1983, avant d’être renversé par lui en août suivant. Issu du mariage entre un Peul et une Mossi, de confession chrétienne mais d’inspiration communiste et tiers-mondiste, Sankara engage son pays dans de profondes réformes, qui vont lui valoir le surnom de « Che Guevara africain ». Président du Conseil national révolutionnaire, il mène à marche forcée (en réprimant si besoin toute forme d’opposition) une politique active de développement du pays, d’éradication de la faim, d’alphabétisation ou encore de libération des femmes. Au passage, il débaptise la Haute-Volta et en fait une république démocratique populaire dotée du nom, plus africain, de Burkina Faso.
Son anti-impérialisme et sa rigueur ne font pas que des heureux : d’abord dans le camp occidental et chez ses voisins, à telle enseigne que le Togo entre brièvement en guerre contre le Burkina Faso en 1985, à la suite d’une prétendue violation de frontière par des soldats burkinabé. Les relations sont également tendues avec le Mali. Après plusieurs escarmouches frontalières en 1974, un véritable conflit, la guerre de Noël, éclate en décembre 1985, au motif que le Burkina a procédé à une opération de recensement dans une zone contestée (cf. Encadré dans l’article sur le Mali). Sankara mécontente également les chefs traditionnels du pays, privés de nombreuses prérogatives, ainsi qu’une partie de son entourage qui goûte peu sa politique anti-corruption : suppression des voitures de luxe de fonction et des voyages en classe affaires, diminution des salaires des ministres et hauts fonctionnaires. Finalement, le chef de l’État meurt assassiné en octobre 1987, à l’instigation du capitaine Blaise Compaoré (dont la responsabilité sera reconnue en 2022).
Une nouvelle Constitution entre en vigueur en 1991. Mais, malgré le rétablissement du multipartisme, Compaoré est le seul candidat à la présidentielle la même année, de sorte que la participation au scrutin dépasse à peine 25 %. Il est réélu aux trois scrutins suivants, au prix de fraudes, dans un contexte de dégradation des relations avec la Côte d’Ivoire. Les autorités de Yamoussoukro accusent en effet le régime de Ouagadougou de soutenir la rébellion à tonalité musulmane qui éclate dans le nord ivoirien en 2002 ; quelque trois millions de Burkinabé vivent alors en Côte d’Ivoire. Finalement, Compaoré doit renoncer au pouvoir en 2014, après des manifestations dénonçant ses tentatives d’amender la Constitution pour pouvoir briguer un nouveau mandat. Un million de personnes sont descendues dans les rues et les affrontements ont fait une vingtaine de morts.
Organisée par les militaires, la période de transition débute plutôt bien, avec la nomination d’un Président et d’un Premier ministre intérimaires. Mais elle est interrompue, en septembre 2015, par le coup de force d’un proche de Compaoré et de soldats du Régiment de sécurité présidentielle. Leur tentative ayant finalement échoué, les putschistes acceptent de signer un accord de reddition devant le roi des Mossis. Tenues en novembre, les élections générales voient l’élection, dès le premier tour, d’un ancien Premier ministre de Compaoré passé dans l’opposition : Roch Kaboré est le premier Président civil depuis près de cinquante ans. Malgré la dégradation de l’économie et la montée en puissance de groupes djihadistes (à partir de 2016), il est réélu en 2020, mais dans un contexte dégradé : du fait de l’insécurité, les élections n’ont pu se dérouler sur au moins un cinquième du territoire, au nord et à l’est du Burkina Faso. Kaboré n’ira pas au bout de son second mandat. Il est déposé en janvier 2022 par un « Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration » dont le chef est lui-même renversé, en septembre suivant, par un autre militaire : le jeune capitaine Ibrahim Traoré, premier musulman à diriger l’État depuis Lamizana.
Une nouvelle période de transition est instaurée, pour une durée incertaine, compte-tenu de la dégradation des conditions sécuritaires dans le pays, en particulier dans les régions frontalières du Mali et du Niger. Elles sont le fait de groupes djihadistes affiliés à Al-Qaida (comme Ansarul Islam) ou à l’organisation État islamique, mais aussi des milices d’autodéfense soutenues par le pouvoir (les Volontaires de défense de la patrie) et de l’armée elle-même. Des militaires burkinabé sont mis en cause dans la mort de cent cinquante à deux cents habitants du village nordiste de Karma, en avril 2023, en représailles à un raid islamiste commis quelques jours plus tôt dans une localité voisine ; les villageois peuls sont en effet considérés comme des soutiens des groupes terroristes. L’un d’eux, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, lié à Al-Qaida) commet son plus grand massacre dans un village du centre-nord, en août 2024 : le nombre de morts se situe entre trois cents et quatre cents. De plus en plus meurtrières, les violences ont conduit au déplacement de deux millions de personnes à l’intérieur du pays.
Dans ce contexte, le nouveau régime du Burkina Faso s’est rapproché de son rival malien, ainsi que du Niger, eux aussi dirigés par des juntes aux prises avec des mouvements djihadistes. Après avoir quitté l’organisation régionale (la Cedeao), les trois pays ont formé une Alliance des États du Sahel, soutenue par la Russie. Les forces françaises qui participaient à la lutte anti-djihadiste ont été invitées à quitter le pays par un pouvoir qui renoue avec la geste de Sankara. En 2023, le français a été remplacé comme langue officielle par quatre des langues nationales et en octobre 2024 la devise de l’ancien chef révolutionnaire (« La Patrie ou la Mort, Nous vaincrons ») est rétablie dans la Constitution. En décembre, le chef du gouvernement, pourtant sankariste, est démis de ses fonctions, après deux ans à ce poste. En octobre, il avait heurté des chefs coutumiers en remettant en cause l’efficacité des fétiches face à la menace terroriste et en plaidant pour faire davantage appel aux connaissances scientifiques.