15 000 km²
République
Capitale : Dili
Monnaie : dollar US
1,8 M de Timorais
Comptant près de 230 km de frontière avec l’Indonésie, à laquelle appartient la moitié occidentale de l’île de Timor, le pays est composé de deux zones séparées qui avaient été colonisées par les Portugais : les 14 200 km² de la moitié orientale et les 815 km² de l’exclave d’Oecussi-Ambeno, située sur la côte nord de la partie indonésienne. Séparé de l’Australie par la mer de Timor, au sud, Timor-Leste possède près de 710 km de côtes. Son climat est tropical et son relief assez montagneux, avec un point culminant à un peu moins de 3 000 m.
Le territoire compte une quinzaine de groupes ethniques, parlant des langues austronésiennes (dont la plus répandue, le tetoum prasa, est parlé par 37 % de la population[1]) et des langues papoues (comme le makasai 10 %). Choisi pour diffuser le catholicisme, le tetoum est langue officielle avec le portugais.
La population est en quasi-totalité (97 %) adepte du catholicisme, religion qui est également majoritaire dans la partie indonésienne de l’île.
[1] Les habitants de l’enclave d’Oecussi s’expriment dans une autre langue austronésienne, l’uab meto ou dawan, très nettement majoritaire dans la partie occidentale restée sous souveraineté indonésienne.
Après une occupation indonésienne ayant fait entre 100 000 et 180 000 morts (cf. L’Encadré sur Timor dans Indonésie) et la large victoire du « oui » au référendum d’août 1999 sur l’indépendance, l’ONU met en place une administration provisoire, afin d’aider l’ancienne colonie portugaise à se doter de toutes les infrastructures lui faisant défaut : enseignement, police, transports… En octobre 2000, le leader indépendantiste « Xanana » Gusmao (libéré par les Indonésiens) prend la direction d’un Conseil national de transition, dont les dissensions sont telles qu’il en démissionne en mars 2001. Il est remplacé par José Ramos-Horta. En accord avec les autorités onusiennes locales, une Assemblée constituante – dominée par les indépendantistes du Fretilin – est élue en août 2001. L’indépendance de la République démocratique du Timor-Lorosae est formellement déclarée en mai 2002, un mois après la large élection de Gusmao comme Président de la République. Dans un régime où les pouvoirs présidentiels s’exercent principalement en matière de diplomatie et de défense[1], il est flanqué, comme Premier ministre, du Secrétaire général du Fretilin, Mari Alkatiri, un musulman formé au marxisme au cours de ses exils au Mozambique et en Angola.
Au printemps 2006, la jeune République doit affronter la rébellion de quelques centaines de soldats – représentant un tiers de son armée – limogés par le gouvernement pour avoir dénoncé leurs pénibles conditions de travail et des promotions jugées injustifiées. Les embuscades des rebelles atteignent un niveau tel que l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Portugal et la Malaisie envoient des centaines d’hommes pour rétablir l’ordre ; la mission militaire de l’ONU avait pris fin un an plus tôt, remplacée par une mission politique de quelques dizaines de fonctionnaires. La rébellion traduit des divisions ethniques séculaires : nombre de ses membres, originaires de l’ouest de Timor-Leste, s’estiment lésés par « ceux de l’est », majoritaires dans les rangs du Fretilin ; de fait, l’ancienne rébellion marxisante a confisqué à son profit l’essentiel des bénéfices économiques et politiques de l’indépendance, au risque de faire du pays un « Cuba asiatique ». En juin, Gusmao reprend l’initiative. Ayant obtenu la promesse qu’ils seraient associés aux discussions de sortie de crise, les insurgés remettent leur armement aux forces australiennes. De son côté, Alkatiri finit par démissionner, accusé d’avoir armé ses partisans durant les affrontements ; il est remplacé par Ramos-Horta, à qui Gusmao avait déjà confié le commandement des forces armées.
En parallèle, le Président timorais obtient de l’Indonésie une aide humanitaire pour les 70 000 réfugiés victimes du conflit interne. Le jeune État a en effet choisi de jouer la carte de l’apaisement avec l’ancien occupant indonésien, devenu un important partenaire commercial, quitte à ne pas rouvrir la question des dédommagements de guerre[2]. En avril 2005, le Président indonésien – lui-même ancien officier au Timor dans les années 1980 – s’était rendu en visite officielle à Dili.
La rébellion reprend début 2007, dans les montagnes au sud de la capitale, sous la conduite d’un des sous-officiers révoltés de 2006, accompagné de quelques dizaines de policiers et de soldats mutins. Des affrontements opposent des groupes de jeunes, armés d’arcs aux flèches empoisonnées, aux troupes internationales. Le chef de l’insurrection est finalement tué en février 2008, lors d’un assaut ayant échoué à tuer Gusmao mais grièvement blessé Ramos-Horta.
En avril précédent, le « ticket » avait été reconduit à la tête de l’État, mais avec des rôles inversés : Ramos-Horta avait été élu Président, avec 69 % des suffrages au second tour du scrutin d’avril 2007. Dans la foulée, il avait confié à Gusmao le soin de former un gouvernement de coalition autour de son nouveau parti, le Congrès national de reconstruction du Timor (CNRT), bien qu’il ne soit arrivé qu’en deuxième position aux législatives, derrière le Fretilin. En réaction à cette décision, des jeunes du mouvement indépendantiste s’en étaient pris à la police, à des ONG et à des véhicules de l’ONU à Dili et à Bacau.
Au printemps 2012, Ramos-Horta échoue à se faire réélire. Abandonné par le CNRT, il est éliminé dès le premier tour et doit céder sa fonction au candidat « indépendant » soutenu par le parti de Gusmao : le général de Vasconcelos (dit Taur Matan Ruak), ancien chef des forces armées qui devance au second tour un autre ancien guérillero portant les couleurs du Fretilin. En juillet 2012, le CNRT et ses alliés remportent largement les législatives, tenues cette fois dans le calme. Reconduit au poste de Premier ministre, Gusmao en démissionne en février 2015, faute d’avoir réussi à mettre fin à la corruption, y compris gouvernementale, qui freine le développement du pays. La moitié des Timorais vit sous le seuil de pauvreté et le chômage explose chez les plus jeunes (70% de la population a moins de 30 ans). L’inertie paralyse notamment le développement des infrastructures pétrolières, alors que le pays a un besoin crucial des réserves pétrolières et gazières de la mer de Timor, situées à 150 km de son littoral et 450 km des côtes australiennes. En janvier 2017, Dili obtient de Canberra la renégociation de la frontière maritime qui avait été négociée avec l’Australie après l’indépendance.
En mars suivant, le Fretilin retrouve sa prééminence : devenu social-démocrate et allié provisoirement au CNRT de Gusmao, il remporte coup sur coup la présidentielle avec Francisco Guterres, dit « Lu Olo »[3], puis les législatives. Mais le gouvernement formé par Alkatiri est instable et des élections anticipées doivent être organisées dès mai 2018 : marquées par des heurts ayant fait des dizaines de blessés, elles voient le large succès de la nouvelle alliance formée par le CNRT avec le Parti de la libération du peuple (PLP) de l’ancien président Taur Matan Ruak, contre le Fretilin qui est renvoyé dans l’opposition. La nouvelle équipe gouvernementale n’étant pas plus stable que les précédentes, le budget 2020 ne peut être voté, ce qui accroît les difficultés d’une population dont plus de 40 % vit encore sous le seuil de pauvreté. Le CNRT s’étant retiré du gouvernement, le Fretilin y fait son retour.
Deux ans plus tard, Guterres est battu aux présidentielles et doit céder sa place au revenant Ramos-Horta. Soutenu par le CNRT, l’ancien chef de l’État remporte 62 % des voix au scrutin du printemps 2022. La même année, le pays est admis à l’ASEAN, onze ans après avoir déposé sa candidature. Entretemps, il a développé ses infrastructures, électrifié le territoire à 90 % et modernisé le port de Dili. En matière pétrolière et gazière, il joue des oppositions existant entre Australiens et Chinois pour renégocier à son avantage ses contrats d’exploitation. En mai 2023, le CNRT confirme son succès présidentiel en obtenant 41 % aux législatives, toujours très suivies. Il devance largement les partis du gouvernement sortant, dont le Fretilin qui obtient le pire résultat de son histoire (26 %). Ayant raté de quelques sièges la majorité absolue du Parlement, Gusmao négocie avec le Parti démocrate, arrivé troisième, pour retrouver le poste de Premier ministre, à l’âge de 76 ans.
[1] Le Président dispose aussi d’un droit de veto sur certains textes et peut dissoudre le Parlement en cas de blocage.
[2] Ainsi, la justice timoraise libère en 2009 un milicien accusé d’avoir tué une trentaine de personnes dans une église dix ans plus tôt.
[3] Toutes les élections sont largement suivies, avec 71 % à 81 % de participation.