2 780 400 km²
République présidentielle fédérale
Capitale : Buenos-Aires
Monnaie : peso argentin
47 millions d’habitants (Argentins)


Ouverte sur l’océan Atlantique à l’est (4 989 km de côtes), l’Argentine s’étend sur près de 3 700 km du nord au sud et 1 200 d’est en ouest. Elle partage 11 968 km de frontières terrestres avec cinq pays : 6 691 avec le Chili à l’ouest, 942 avec la Bolivie et 2 531 avec le Paraguay au nord, 1 263 avec le Brésil et 541 avec l’Uruguay au nord-est. A l’extrême-sud, elle partage l’archipel de la Terre de feu avec le Chili (cf. Particularismes géopolitiques) et à l’est l’estuaire du Rio de Plata avec l’Uruguay.
L’Argentine revendique 965 597 km2 de territoires en Antarctique (dont les îles Shetland du sud, 3 867 km² également revendiqués par le Chili et le Royaume-Uni, et les Orcades du sud, 622 km² que réclame aussi Londres, cf. Antarctique), ainsi que des archipels de l’Atlantique sous souveraineté britannique : les Malouines (ou Falkland, situées à plus de 460 km des côtes sud-américaines), la Géorgie du Sud (3755 km²) et les îles Sandwich du sud (310 km²) ; toutes sont d’ailleurs représentées comme des territoires argentins dans les cartes et les manuels scolaires.
Le relief est composé des plaines arides du Grand Chaco au nord, des plaines fertiles de la Pampa au centre et des steppes arides de Patagonie au sud. A l’ouest, le long de la frontière avec le Chili, domine la Cordillère des Andes qui culmine à plus de 6 960 m à l’Aconcagua (le plus haut sommet d’Amérique du sud). Au nord-est, la petite province de Misiones s’insinue entre le Paraguay et le Brésil : en partie couverte de forêts sub-tropicales, elle compte les impressionnantes chutes d’Iguazú (dont 20 % se situent au Brésil). Globalement tempéré, le climat est localement aride, subtropical ou subarctique (au sud-ouest).
L’Argentine est une république fédérale constituée de vingt-trois provinces (bénéficiant d’une grande autonomie en matière de gestion de leurs affaires intérieures) et de la ville autonome de Buenos-Aires. La capitale et sa province homonyme regroupent un tiers de la population argentine.
Les descendants d’Européens (principalement italiens 45 % et espagnols 31 %) constituent 97 % de la population avec les Métis. Les Indiens (Guaranis, Quechuas, Mapuches) ne sont même plus 3 %, mais la moitié des Argentins a au moins un ancêtre autochtone, presque toujours par la voie matrilinéaire. Les descendants d’esclaves africains sont moins de 1 %. En l’absence de langue fédérale officielle, ce rôle est rempli par l’espagnol qui, du fait de la taille du pays, varie de région en région : le dialecte le plus répandu est l’espagnol rioplatense, principalement parlé autour du bassin de La Plata. Certaines langues sont officielles dans quelques régions : des langues indiennes (guarani, quechua…) et l’inattendu gallois (dans la province de Chubut, en Patagonie centrale, peuplée au XIXe siècle de colons de cette nationalité fuyant le Royaume-Uni).

Sur les 81 % d’habitants déclarant une religion, 63 % sont catholiques et 15 % protestants évangéliques (essentiellement pentecôtistes). Les autres appartiennent à d’autres chapelles chrétiennes (Témoins de Jéhovah, Église de Jésus-Christ) ou à d’autres confessions (juifs, musulmans). L’Église argentine est la première d’Amérique a avoir donné un pape au catholicisme (François, de 2013 à 2025).
En 1816, les Provinces unies du Río de la Plata déclarent leur indépendance vis-à-vis de l’Espagne. Leur territoire s’étend alors de l’estuaire des fleuves Uruguay et Paraná jusqu’au sud de la Bolivie. Mais la Fédération se dissout au fil des années : affaiblie par une guerre contre le Brésil, elle perd le territoire de Tarija (qui devient bolivien en 1826), avant que l’Uruguay n’acquière son indépendance deux ans plus tard. En 1828, les Provinces unies ne se résument plus qu’à la seule république d’Argentine, dotée d’une Constitution en 1826. Dans la pratique, il s’agit d’une Confédération argentine déchirée entre les unitaires (incarnés principalement par les élites intellectuelles et économiques de Buenos Aires) et les fédéralistes (alliance conservatrice et catholiques de potentats locaux, les caudillos). En 1828, un grand propriétaire de la région de Buenos-Aires lève une troupe de gauchos et de peones et s’empare de la grande ville : s’appuyant sur la prospérité de l’élevage dans la Pampa (notamment de moutons pour l’industrie textile britannique) et sur l’activité du port de Buenos-Aires, Juan Manuel de Rosas devient le dirigeant principal de la Confédération, nouant des alliances avec les caudillos d’autres provinces. Mais certains d’entre eux ne s’accommodent pas de cette toute puissance qui les empêche, notamment, de commercer directement avec l’extérieur. C’est le cas de celui d’Entre Rios qui, avec l’appui de troupes brésiliennes et uruguayennes, défait les forces de Rosas en 1852. Le vainqueur, Justo José de Urquiza proclame une nouvelle Constitution : mêlant fédéralisme et régime présidentiel, elle est acceptée par toutes les provinces, sauf celle de Buenos-Aires qui fait sécession. De nouveaux combats fratricides éclatent et ne cessent qu’en 1862, avec l’élection à la présidence du chef des sécessionnistes, Bartolomé Mitre.
En 1865, la Confédération argentine entre en guerre aux côtés du Brésil et de l’Uruguay contre le Paraguay, puissance militaire montante de la région. Victorieux de cette guerre de la Triple-Alliance, les Argentins récupèrent (dans le traité signé en 1876) une partie du Chaco ainsi que la région des Misiones : ainsi nommée en raison des missions que les jésuites y avaient implantées pour évangéliser les Guaranis, cette zone située entre les fleuves Paraña et Uruguay avait été annexée en 1838 par les Paraguayens.
A partir de 1860, l’Argentine et son voisin chilien se lancent à la conquête des régions du Sud (Pampa méridionale et Patagonie orientale) avec le même objectif : s’assurer leur contrôle pour se donner un accès à un deuxième océan, l’Atlantique pour le Chili et le Pacifique pour l’Argentine. Ces territoires, qui n’ont jamais été soumis par les Espagnols, sont en effet aux mains des semi-nomades Mapuches (Araucans) et des différents peuples « Patagons » qu’ils ont assimilés (« araucanisés »), de gré ou de force, entre les XVIIe et XIXe siècle, à l’image des Gennakenk (membres du peuple Tehuelche). Les victimes n’ont pas eu d’autre choix que de s’intégrer aux envahisseurs (ce qui donnera naissance à l’ethnie Puelche) ou bien de retourner vers le sud pour fusionner avec leurs frères Aonikenks et combattre ensemble les envahisseurs. Des combats sanglants et acharnés ont ainsi lieu en 1865 sur les rives du Río Senguerr. Connues sous le nom de Conquête du désert, les opérations militaires argentines se poursuivent jusqu’en 1884 et font plus de 20 000 morts (sans compter les combattants). Ayant perdu leurs terres, les survivants sont déportés à Buenos-Aires ou regroupés dans des zones stériles de faible superficie (les reservaciones), le reste des terres étant déclaré bien national, puis vendu à l’encan. Au passage, l’Argentine a mis fin aux ambitions chiliennes d’annexer l’ensemble de la Patagonie : en menaçant de s’allier aux ennemis des Chiliens dans la guerre du Pacifique (cf. Chili), Buenos-Aires obtient toute la zone située à l’est de la Cordillère des Andes (traité des frontières signé en 1881).
L’expansion territoriale et le retour de la stabilité politique favorisent le développement économique de la République d’Argentine (son nom courant à partir de 1880) : à l’élevage des moutons, qui s’intensifie dans l’ouest de la Pampa et en Patagonie, s’ajoutent celui des bovins (pour la viande) et la culture des céréales dans l’est de la Pampa, productions qui prennent principalement la direction de la Grande-Bretagne. De 2 millions en 1870, la population passe à plus de 7 millions à la veille de la première Guerre mondiale, du fait d’une importante immigration de main d’œuvre (principalement italienne et espagnole).
Au pouvoir sans discontinuer depuis les années 1860, les héritiers des unitaires doivent le céder à partir de 1874 aux fédéralistes, incarnés par le Parti autonomiste national (PAN). A trente-cinq ans, le général Julio Roca – ministre de la Guerre lors de la Conquête du désert – devient le plus jeune président du pays en 1880. Instaurant le mariage civil et l’école primaire gratuite et laïque, il sépare l’Église de l’État et fait de Buenos-Aires la capitale fédérale du pays (en la détachant de la province éponyme). Durant trente ans, Roca va tirer les ficelles de la vie politique grâce à un système d’alliances qui lui vaudra le surnom de el Zorro (« le Renard »). Il est même réélu pour un second mandat jusqu’en 1904, date à laquelle la frontière avec le voisin chilien est arrêtée de façon pacifique, sous l’égide de la Grande-Bretagne.
L’hégémonie du PAN ne prend fin qu’en 1916, avec l’avènement de l’Union civique radicale (UCR), quatre ans après l’instauration du suffrage universel pour les hommes. Née dans les années 1890, la formation s’appuie sur les citadins et la petite paysannerie. Elle reste au pouvoir jusqu’en 1930, date à laquelle le Président – incapable de juguler la crise économique naissante – est renversé par un coup d’État militaire. Les généraux se succèdent alors au pouvoir, au prix de fraudes électorales, d’une corruption généralisée et de la persécution des opposants. Cette période, connue sous le nom de « décennie infâme » s’achève en 1943 par la chute du général Castillo : il est renversé par le Groupe des Officiers Unis, jeunes militaires nationalistes dirigés par le général Rawson.
Dans leurs rangs s’affirme le colonel Juan Perón, qui est nommé ministre du Travail. Son ouverture aux syndicats commençant à inquiéter les milieux conservateurs, il est emprisonné en 1945, mais libéré après d’importantes manifestations en sa faveur. Marié à l’actrice Eva Duarte, il fonde un parti travailliste qui se fait le défenseur des descamisados (les « sans chemise ») et prône une politique nationaliste qui séduit les classes moyennes et une partie de l’UCR. C’est ainsi que Perón remporte les élections de février 1946 face à l’Union démocratique, vaste coalition favorisée par les États-Unis (allant des conservateurs aux communistes) pour contrer le péronisme. Bénéficiant de la reprise économique générée par la fin de la deuxième Guerre mondiale, le nouveau Président met en place une politique dite justicialiste (entre le capitalisme et le communisme) faite de nationalisations d’entreprises étrangères et de redistribution des richesses, notamment via la Fondation d’Eva Perón : en 1947, celle-ci obtient le droit de vote pour les femmes. S’appuyant sur la forte colonie allemande vivant déjà dans le pays, le régime autorise également l’entrée discrète de plusieurs centaines de criminels de guerre fuyant l’Europe, après l’effondrement de l’Allemagne nazie : les plus célèbres sont le médecin d’Auschwitz Josef Mengele (qui finira sa vie au Brésil) et l’administrateur de l’Holocauste Adolf Eichmann (enlevé par les services israéliens en 1960, il sera exécuté deux ans plus tard).
La situation du régime péroniste se dégrade au début des années 1950 : les pays européens diminuent leurs importations de produits argentins, « Evita » meurt et l’Église s’insurge contre l’instauration du divorce et la laïcisation de l’enseignement. Après plusieurs tentatives de putschs militaires, dont l’une tue des centaines de militants péronistes, Perón démissionne en 1955 et s’exile en Espagne. Le pouvoir est alors exercé par les militaires, même s’ils le confient à des Présidents radicaux qu’ils remplacent au gré des événements. Le régime ne parvenant pas à juguler l’influence persistante du péronisme, il permet le retour de Perón qui remporte largement la présidentielle de 1973 avec sa nouvelle épouse Isabel comme vice-Présidente.
Mais, en une quinzaine d’années, le péronisme a changé et s’est divisé en une aile orthodoxe et autoritaire, fidèle au chef de l’État, et une aile radicale, qui réclame la poursuite des réformes entreprises lors des premiers mandats ; cette sensibilité est notamment incarnée par la Tendance révolutionnaire (la jeunesse justicialiste) et les Montoneros, un groupe pratiquant la guérilla urbaine depuis le début des années 1970. Considérant ces éléments comme des mouvements subversifs (au même titre que l’Armée révolutionnaire du peuple, trotskyste), un ministre proche des Perón finance un escadron de la mort, connu sous le nom de Triple A (Alliance anticommuniste argentine), qui va liquider physiquement au moins sept-cents militants de gauche. Décédé durant l’été 1974, le chef de l’État est remplacé par sa veuve, qui poursuit la politique de son mari, avant d’être renversée deux ans plus tard par une junte formée par les chefs des trois armes.
Dirigé par le général Videla, le régime militaire proclame l’édification d’un « ordre nouveau » suivant « les valeurs de la morale chrétienne ». Son « Processus de réconciliation nationale » s’inspire des dictatures arrivées au pouvoir au Chili et en Uruguay en 1973. Adepte d’un système économique ultralibéral, il pratique une politique répressive inspirée du nazisme (dont certains putschistes sont des admirateurs) et des techniques anti-guérilla mises en œuvre par les Français durant la bataille d’Alger (en 1957). Les syndicats sont dissous, les grèves interdites et les opposants traqués sans relâche : 30 000 personnes vont mourir ou « disparaître » dans les centres de torture de l’armée (dont l’ESMA, l’Ecole mécanique de la marine), quand ils ne sont pas jetés dans l’océan depuis un avion, après avoir été drogués. Plus d’1,5 million d’Argentins prennent le chemin de l’exil et au moins cinq cents enfants de « disparus » sont confiés à des familles proches du pouvoir. Les services argentins prennent également une part active dans le plan Condor qui vise à éliminer, partout où ils se trouvent, les opposants aux dictatures sud-américaines. La proximité idéologique entre l’Argentine et le Chili n’empêche pas les deux pays d’être à deux doigts d’entrer en guerre en 1978, pour la possession de quelques petites îles australes dans le canal de Beagle, au sud de la Terre de feu. Le conflit ne sera vraiment résolu qu’en 1984, après la chute des militaires argentins : le traité signé sous l’égide du Vatican attribuera les îles au Chili, mais une grande partie des droits maritimes à l’Argentine ; il inclut également une délimitation du détroit de Magellan.
A partir de 1978, le pouvoir de la junte se fissure. Les familles de disparus (les « mères de la place de Mai ») manifestent malgré la répression et se font notamment connaître lors de la Coupe du monde de football, tandis que l’enlèvement et l’assassinat d’étrangers (dont des religieuses) attirent l’attention de la communauté internationale. La junte elle-même se fissure, une de ses composantes étant tentée de se rapprocher des péronistes. Mais c’est une autre faction, réactionnaire, qui prend le dessus fin 1981. Jouant la carte nationaliste pour redorer le blason du régime, le général Galtieri décide d’envahir les îles Malouines (ou Falkland) et la Géorgie du sud, propriétés des Britanniques mais contestées de longue date par Buenos-Aires et placées par l’ONU sur sa liste des territoires à décoloniser. L’opération est un fiasco : Londres envoie des renforts massifs (dix mille hommes appuyés par une importante force aéronavale) et vient rapidement à bout de son adversaire. Neuf cents soldats (dont plus de 70 % d’Argentins) et trois civils sont tués en deux mois.
Après ce cuisant échec, le nouveau chef de la junte organise le retour à la démocratie. Le radical Raul Alfonsin est élu en 1983, suivi six ans plus tard de Carlos Menem, représentant de l’aile droite du Parti justicialiste (péroniste). C’est sous son mandat que, en 1994, une voiture piégée explose devant un bâtiment de Buenos-Aires abritant plusieurs associations juives, dont l’Association mutuelle israélite argentine (Amia), le pays comptant la plus importante communauté judaïque d’Amérique du sud : 85 personnes sont tuées. L’attentat ne sera jamais revendiqué, mais les soupçons se portent sur l’Iran : Téhéran aurait commandité cet acte au Hezbollah (bien implanté dans la zone des trois frontières, à l’intersection de l’Argentine, du Paraguay et du Brésil), pour punir Buenos-Aires d’avoir annulé la livraison d’équipements nécessaires au programme nucléaire iranien. Des complicités argentines seront pointées, notamment dans la dissimulation des preuves, mais ces accusations n’auront pas de suite ; le procureur chargé de l’enquête mourra en 2015, d’une balle dans la tête à son domicile, dans des conditions troublantes (toutes les caméras de surveillance de son immeuble étant en panne).
La politique libérale de Menem, marquée notamment par la dollarisation de l’économie, accroit la dette extérieure du pays et contribue à dégrader son système social, jusqu’alors considéré comme le meilleur d’Amérique du sud. Une grave crise économique éclate en 2001-2002 : elle se traduit par de violentes manifestations anti-gouvernementales (une trentaine de morts), marquées par des concerts de casserole, la fuite du Président radical de la Rua et la démission de ses successeurs (quatre chefs d’État en dix jours). Les élections convoquées en 2003 marquent le retour des péronistes, cette fois de centre-gauche, avec Néstor Kirchner, suivi de son épouse Cristina Fernández de Kirchner, à partir de 2007. Le premier annule les différentes lois d’amnistie qui avaient été votées en faveur des acteurs de la dictature, sous les présidences Alfonsin et Menem, après des tentatives de putsch de militaires d’extrême-droite. Une soixantaine de personnes sont ainsi condamnées à partir de 2005. En 2011, la perpétuité est prononcée contre l’ex-Capitaine Astiz (« l’ange blond de la mort ») et onze co-accusés pour la mort et la disparition de plusieurs centaines de personnes à l’ESMA. Sur le plan économique, le « kirchnérisme » engendre une reprise, suivie d’une nouvelle détérioration à partir de 2011.
En 2015, la Présidente ne pouvant se représenter, elle soutient un candidat qui est battu de justesse au second tour. Membre d’une des familles les plus riches du pays, le vainqueur Mauricio Macri est le premier chef d’État de l’ère moderne à n’être ni péroniste ni radical (même s’il est soutenu par l’UCR). Il engage des réformes ultralibérales qui ne parviennent à juguler ni la pauvreté, ni l’inflation. Le mécontentement de la population entraîne un retour des péronistes, qui ont fait taire leurs divergences : Cristina de Kirchner est élue vice-Présidente, bien qu’impliquée dans une douzaine d’affaires de fraude et détournement de fonds (qui lui vaudront d’être condamnée, en 2024, à six ans de prison et une inéligibilité à vie, en attendant un procès pour entrave à la justice dans l’enquête sur le rôle de l’Iran dans l’attentat de 1994).
Mais le pays reste englué dans ses maux (dette publique colossale, hyperinflation, dérive monétaire) si bien que, en 2023, les électeurs choisissent un outsider comme Président : l’économiste Javier Milei, dirigeant du Parti libertarien, est le chef d’État le mieux élu depuis le retour de la démocratie (avec 56 % des voix au second tour), sans que sa coalition Liberdad Avanza ne dispose de majorité parlementaire, ni de gouverneurs. Partisan du minarchisme (la réduction au maximum de la sphère publique), Miléi est climato-sceptique et remet en cause les accusations portées contre la dictature. Il gouverne avec l’appui de la droite.
Photo : la place de Mai, à Buenos-Aires
Les Malouines ou Falkland
Découvertes par Vespucci au début du XVIe siècle, les 778 îles (alors inhabitées) reçoivent le nom de Falkland à la fin du XVIIe (en hommage au seigneur écossais d’un marin britannique) puis celui de Malouines, en raison de l’origine de ses premiers colons permanents : des marins-pêcheurs de Saint-Malo. Elles forment aujourd’hui un territoire d’outre-mer britannique, de 12 173 km², doté d’une large autonomie. L’Argentine les revendique en estimant qu’elles sont situées sur son plateau continental et qu’elles auraient dû lui revenir, puisque les Espagnols s’en étaient rendus maîtres au XVIIIe siècle. Quelques gauchos s’y installent d’ailleurs dans les années 1820 (quelque temps après l’indépendance de l’Argentine), suivis d’une petite garnison qui est chassée par les Britanniques : ceux-ci, qui affirment avoir planté leur drapeau sur l’archipel dès 1765, y implantent des colons à partir de 1833.
Les 3 200 habitants actuels (dont les trois quarts vivent dans la capitale Port Stanley) sont originaires à un peu plus de 40 % de l’archipel, les autres venant principalement du Royaume-Uni, de l’île britannique de Sainte-Hélène et du Chili. Ils possèdent un PIB de 103 000 € par habitant (près de dix fois supérieur à celui des Argentins et près de trois fois à celui des Britanniques). Il s’agit principalement d’éleveurs de moutons (500 000 têtes dans l’archipel), qui se sont très nettement enrichis après la guerre de 1982, Londres ayant investi fortement dans un territoire qu’il était un temps envisagé de céder. Une ZEE de 200 miles nautiques a été instaurée en 1986 et une zone de pêche ouverte aux pêcheurs européens, surtout espagnols ; la pêche, principalement celle de calamars, fournit plus de la moitié du PIB de l’archipel. La population a augmenté de 77 % entre 1980 et 2016, malgré la dureté des conditions de vie : le vent est si fort que rien ne pousse dans l’archipel, qui importe quasiment toute son alimentation (parfois directement du Royaume-Uni). Les revenus des îliens devraient encore augmenter avec une l’exploitation de pétrole offshore, dans des zones moins profondes que celles du golfe du Mexique, de la mer du Nord ou de l’Atlantique au large de l’Angola.
Ces perspectives ont relancé les prétentions argentines, même si Buenos-Aires n’a plus les capacités de mener une nouvelle offensive contre un archipel où Londres maintient quelques centaines de soldats, soutenus par une force aéronavale locale. En 2013, le référendum d’autodétermination organisé par les autorités consacre le souhait de 98,8 % des habitants de ne rien changer au statut des Falkland (92 % de participation). Refusant toute légitimité au scrutin, Buenos-Aires réplique sur le terrain diplomatique. En 2016, une Commission scientifique consultative, établie par l’ONU, préconise d’étendre le plateau continental argentin jusqu’aux Malouines.
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