L'Oubangui près de Bangui.

République centrafricaine

Depuis son indépendance, la Centrafrique oscille entre dictatures et guerres civiles.

622 984 km²

République présidentielle

Capitale : Bangui

Monnaie : franc CFA

5,7 millions de Centrafricains

Totalement enclavée, la Centrafrique, ancienne colonie française d’Oubangui-Chari, partage 5 920 km de frontières terrestres avec six pays : 901 avec le Cameroun à l’ouest, 1 556 avec le Tchad au nord, 174 avec le Soudan au nord-est, 1 055 avec le Sud-Soudan à l’est, 1 747 avec la République démocratique du Congo au sud et 487 avec la République du Congo au sud-ouest.

Partagé entre savanes et forêts (au sud), le pays comporte deux grands bassins séparés : au nord, l’un s’écoule vers le lac Tchad avec des cours d’eau comme le Chari et le Logone ; l’autre bassin est formé des affluents de l’Oubangui qui coulent vers le bassin du Congo, au sud. Le plateau central est bordé de reliefs plus importants à l’ouest (avec un point culminant à 1 410 m) et à l’est. Le climat est majoritairement tropical, mais équatorial au sud, intertropical à l’ouest et sub-sahélien vers Birao au nord.

Le pays compte 80 groupes ethniques parlant autant de langues, la plupart de la famille oubanguienne. Les plus nombreux sont les « gens de la savane » (Gbaya 29 %, Banda 23 %, Mandija 10 %), devant les « gens du fleuve » (Ngbaka 8 %, Ngbandi 5.5 % dont les Yakoma, Zandé-Nzakara 3%). Le nord est peuplé de Sara 8 % (nilo-sahariens également présents au Tchad), d’Arabes et de Peuls (6 %) et de Mboum d’origine soudanaise. La langue officielle est le français, mais celle qui est de loin la plus employée est le sango, issu du ngbandi.

73 % des Centrafricains sont de religion chrétienne (dont 34 % de catholiques), 14 % de confession musulmane et 12 % adeptes de religions traditionnelles.

La colonie française d’Oubangui-Chari accède à l’indépendance en 1960, sous le nom de République centrafricaine, avec comme premier Président David Dacko. Originaire de Bambari, au centre du pays, il est le neveu de l’abbé Boganda, décédé l’année précédente, qui dominait la scène politique locale depuis 1945 et ambitionnait de réunir dans un même Etat les colonies françaises de l’Oubangui-Chari, du Tchad et du moyen-Congo. Ayant fait du Mouvement d’évolution sociale de l’Afrique noire (Mesan) le parti unique de Centrafrique, Dacko est réélu en 1964.

Le dernier jour de l’année suivante, il est déposé par son cousin germain, Jean Bedel Bokassa, un ancien officier de l’armée française qu’il avait nommé chef d’État-major, en vue de restructurer une armée confrontée à la violation régulière des frontières du pays, par les rebelles sud-soudanais au nord-est et les partisans congolais de Lubumba au sud. Hostile aux relations nouées par Dacko avec la Chine communiste, en 1964, il épargne son prédécesseur, mais fait exécuter nombre de ses proches et dissout le Parlement. Tout en menant un certain nombre de réformes (comme l’interdiction de l’excision ou le développement des transports à Bangui), il instaure un pouvoir de type dictatorial, fait de répression de toute forme d’opposition. Autoproclamé Président à vie en 1972, il se promeut maréchal deux ans plus tard et se convertit à la religion musulmane, en vue de bénéficier d’aides financières du colonel libyen Kadhafi. En décembre 1976, il établit une nouvelle Constitution qui fait du pays une monarchie. Reconverti au catholicisme, il se fait couronner Empereur un an plus tard, par admiration pour le Français Napoléon 1er.

La corruption et la gabegie croissantes du régime conduisent les étudiants à d’importantes manifestations, qui sont violemment réprimées par le pouvoir en 1979. La même année, Bokassa est déposé par Dacko, à l’occasion d’un putsch organisé par la France. Réélu à la présidence de la république en 1981, dans le cadre d’une nouvelle Constitution, le Président ne reste que quelques mois en fonctions : il est à son tour renversé par son chef d’État-major, le général Kolingba. Désigné Président à vie en 1986, ce dernier fonde l’année suivante le Rassemblement démocratique centrafricain (RDC), parti unique jusqu’à l’adoption forcée du multipartisme en 1991. Deux ans plus tard, le chef de l’État se plie au verdict des urnes : arrivé seulement quatrième à l’élection présidentielle, il cède sa place à Ange-Félix Patassé, un ancien Premier ministre de Bokassa. Kolingba essaie de reprendre le pouvoir par la force en 2001, mais échoue, ce qui vaut à son ethnie des Yakoma de subir une sanglante répression.


En 2003, Patassé est à son tour victime d’un coup d’État commis par le général Bozizé, un membre de son ethnie Gbaya, qu’il avait nommé chef d’État-major. Après deux putschs manqués contre un régime soutenu par la Libye et par les miliciens ultra-violents du Mouvement de libération du Congo, Bozizé réussit le troisième, avec l’aide de soldats de l’armée française et de miliciens tchadiens. A peine nommé, il doit affronter à partir de 2004 la rébellion d’un certain nombre de mouvements politico-militaires, tels que l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR) de Michel Djotodia : la plupart originaires du nord-est du pays, ces groupes se plaignent de la marginalisation de certaines ethnies, surtout musulmanes, par l’État centrafricain. Après deux accords restés sans suite, le conflit s’achève officiellement par la signature de l’accord de paix global de Libreville au mois de juin 2008.

Bozizé étant accusé de ne pas respecter les accords, la guerre civile reprend à la fin de l’année 2012. Connue sous le nom de Seleka (« coalition » en sango), la rébellion majoritairement musulmane associe l’UFDR à plusieurs mouvements tels que la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP) et le Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC). Progressant dans le pays, elle arrive aux portes de Bangui en mars 2013, contraignant Bozizé à s’enfuir. Djotodia se proclame Président, devenant ainsi le premier musulman à diriger le pays. Mais la paix est loin d’être acquise : les exactions des rebelles contre les chrétiens conduisent ces derniers à former des milices anti-Balaka qui se livrent, en représailles, à des violences contre les adeptes de l’islam. La violence atteint un tel niveau que, en décembre 2013, l’ONU autorise l’armée française à déclencher l’opération Sangaris, en vue de protéger la population et de désarmer les différentes factions armées. Un accord de cessation des hostilités est finalement signé en juillet 2014, laissant de larges pans du pays aux différentes factions issues de la Seleka : le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), l‘Unité pour la paix en Centrafrique (UPC), le Mouvement patriotique pour la Centrafrique (MPC) et le Rassemblement patriotique pour le renouveau de la Centrafrique (RPRC). En décembre 2015, des sécessionnistes proclament même un État indépendant dans le Nord du pays : la République de Logone ou du Dar el-Kouti, du nom d’un sultanat établi dans la région entre les années 1830 et sa conquête par la France fin 1912. La plus grande partie de cette zone a été reprise par l’armée centrafricaine en 2021.

Dans un contexte stabilisé, à défaut d’être pacifié, des présidentielles peuvent être organisées. Elles voient l’élection de Faustin-Archange Touadera, un ancien Premier ministre de Bozizé tombé en disgrâce : il est élu en février 2016, avec près de 63 % des suffrages au second tour. Le scrutin passé, la France retire ses troupes et cède la place aux Casques bleus de la Minusca. Les violences continuant, en particulier dans la région centrale de Bria, le régime centrafricain s’appuie sur des mercenaires, principalement ceux du groupe russe Wagner. En 2019, à Khartoum, le gouvernement signe un accord avec quatorze factions rebelles. En pratique, le texte contribue à la diminution des violences, mais aussi à la consolidation de fiefs rebelles dans une bonne partie du pays.

Un certain nombre d’entre eux poursuivent d’ailleurs le combat, sous le nom de Coalition des patriotes pour le changement (CPC), alliance liée à Bozizé qui réunit des mouvements autrefois ennemis : deux factions anti-Balaka et quatre groupes de l’ex-Seleka (le FRPC à dominante rounga et sara, le MPC à majorité arabe et l’UPC à dominante peule, comme les 3R pour « Retour, Réclamation et Réhabilitation »). Pour stopper l’avancée de la CPC sur Bangui, l’armée centrafricaine et ses supplétifs russes bénéficient du concours de la Minusca et d’un contingent rwandais. En 2022, les soldats russes et les mercenaires sont accusés d’avoir tué des dizaines de civils dans des villages au Nord-Est de la capitale.

En 2023, une nouvelle Constitution est adoptée : portant les mandats présidentiels de cinq à sept ans et supprimant toute limitation de leur nombre, elle offre au chef de l’État – réélu en 2020 – la faculté de prétendre à une nouvelle réélection. La tentation est d’autant plus grande que l’opposition armée est affaiblie : le MPC s’est retiré de la CPC, laquelle s’est scindée entre partisans et opposants de l’ancien Président Bozizé.