Honduras

Honduras

Entre Colombie et Mexique, le Honduras est en proie à la violence des gangs et du narco-trafic.

112 090 km²

République présidentielle

Capitale : Tegucigalpa

Monnaie : le lempira

9,5 millions d’habitants (Honduriens)

Ouvert sur deux océans, le Honduras compte 823 km de côtes : 669 sur la mer des Caraïbes (Atlantique) au nord et 163 sur le golfe de Fonseca (Pacifique) au sud-ouest. Il partage 1 575 km de frontières terrestres avec trois pays : au sud 940 km avec le Nicaragua, à l’ouest 244 km avec le Guatemala et 391 avec le Salvador (qui conteste la souveraineté hondurienne sur l’île de Conejo, dans le golfe de Fonseca). De son côté, le Honduras revendique (comme le Guatemala) certaines îles de la barrière de corail du Belize).

Les étroites plaines côtières sont surmontées de montagnes culminant à 2 870 m. Le climat est subtropical et tempéré sur les hauteurs.

90 % des habitants sont des Métis, 7 % des Amérindiens (dont des Misquitos également présents au Nicaragua), 2 % de Garifunas (métis d’Indiens et de descendants d’esclaves Noirs) et 1 % des Blancs. La langue officielle est l’espagnol.

Sur 88 % des habitants déclarant une religion, 55 % sont des protestants évangéliques et 33 % des catholiques romains.


Issu, en 1839, de la dissolution des Provinces-Unies de l’Amérique centrale (cf. Amérique centrale), le Honduras est affecté, comme la plupart de ses voisins, par les luttes entre conservateurs basés à Comayagua et les libéraux. Finalement victorieux en 1880, ces derniers transfèrent la capitale à Tegucigalpa. Outre la culture des caféiers, le pays développe celle des bananes. Leur place dans l’économie devient telle que, en 1904, un résident américain (l’écrivain O. Henry) qualifie le Honduras de « république bananière ». L’expression fait référence à l’emprise de l’entreprise américaine United Fruit Company, dont le président reconnait lui-même que « Au Honduras, il est moins cher d’acheter un député qu’une mule ! ». Pendant environ cinquante ans, la société soutient des coups d’État en Amérique centrale pour mieux conduire ses activités d’exploitation de bananes et d’autres fruits exotiques.

L’histoire du Honduras est jalonnée de coups de force, de guerre civile (entraînant une intervention américaine en 1924-1925), de soulèvements réprimés dans les régions bananières du nord-ouest, de dictatures et de conflits avec ses voisins. En 1907, une guerre éclate avec le Nicaragua, après l’invasion du Honduras par un groupe d’exilés honduriens soutenus par le régime nicaraguayen. Une armée de Managua, entraînée par l’Allemagne, s’empare même de Tegucigalpa. Le conflit prend fin après un arbitrage des Américains. En 1957 un vieux contentieux avec le Nicaragua refait surface : il porte sur la partie septentrionale de la côte des Mosquitos, une jungle de 1 700 km² habitée par quelque dix mille Indiens, au nord du rio Coco, en bordure de la mer des Caraïbes. En 1906, une sentence arbitrale du roi d’Espagne l’avait attribuée au Honduras, mais cette décision avait été rejetée ensuite par le Nicaragua, maître de la majeure partie du territoire des Mosquitos. Finalement, la Cour internationale de justice (CIJ) l’attribue au Honduras en 1960[1]. Trois ans plus tard, le libéral Morales qui avait tenté d’instaurer une réforme agraire, est renversé par le général Arellano, qui conserve le pouvoir jusqu’en 1971 avec l’appui du Parti national (PN)(conservateur). Sous son mandat, l’armée hondurienne enregistre, en 1969, une cuisante défaite face à son homologue salvadorienne, lors d’une courte guerre déclenchée par un match de football (cf. Salvador).

La première véritable élection démocratique, organisée en 1982 dans le cadre d’une nouvelle Constitution, consacre la victoire du candidat du Parti libéral (PL). Durant cette décennie, le Honduras voit se déployer sur son sol les contras, guérilléros combattant le régime sandiniste du Nicaragua. Soutenu par les Etats-Unis, le régime hondurien appuie également son homologue salvadorien contre la guérilla de gauche qui essaie de le renverser. Des accords de paix ayant été signés par les différents belligérants, le calme revient, notamment sur la scène politique : PN et PL se succèdent sans difficulté majeure à la tête de l’État.

[1] En 2007, la CIJ prononce un jugement également favorable au Honduras, auquel elle attribue quatre petites cayes (îles) revendiquées par le Nicaragua.


Comme ses voisins, le Honduras n’échappe pas à la violence des maras, des bandes criminelles liées à toutes sortes de trafic (principalement les MS-13 et Barrio 18). L’avant-veille de Noël 2004, une vingtaine de passagers d’un autocar – dont des enfants – sont mortellement mitraillés dans le nord du pays. L’action est revendiquée par un commando se réclamant du « groupe Cinchonero » (une organisation armée de gauche active dans les années 1970-1980), mais elle porte plus sûrement la signature des maras, les assassins ayant laissé un message dénonçant l’action du Président Ricardo Maduro (dont le fils a été enlevé puis tué par un de ces gangs). De 2006 à 2016, la violence fait presque 60 000 morts au Honduras (à peine moins qu’au Salvador et plus qu’au Guatemala), hissant le pays au rang de la Colombie et du Mexique pour le taux d’homicide par habitant. La deuxième ville du pays, San Pedro Sula (au nord-est), ravit un temps à Ciudad Juarez le titre de ville la plus dangereuse au monde, avec 174 morts violentes pour 100 000 habitants. A l’automne 2012, des assassinats touchent l’avocat des paysans sans terre (Marca, Mouvement authentique de revendication paysanne de l’Aguan, une région du nord-est) puis le procureur chargé des droits de l’homme (dans le sud).

En juin 2009, le Président conservateur Zelaya est déposé par l’armée et expulsé du pays, pour avoir tenté de modifier la Constitution, en vue de pouvoir briguer un nouveau mandat. Riche propriétaire terrien élu en 2005, Zelaya s’était par ailleurs rapproché du vénézuélien Chavez, après avoir obtenu de Caracas une aide économique que les États-Unis tardaient à lui donner. Une élection présidentielle – non reconnue par la plupart des pays sud-américains – est organisée par les putschistes pour désigner un nouveau Président. Elle voit la victoire, avec un taux de participation contesté, du candidat du PN : Porfirio Lobo obtient 55 % des suffrages, soit 18 % de plus que son principal concurrent, membre du Parti libéral de Zelaya. Celui-ci peut rentrer au Honduras en 2011, après s’être réconcilié avec son successeur.

Fin 2013, selon des résultats fortement contestés par l’opposition, le candidat du Parti national, JO. Hernandez, est élu Président de la république avec un peu moins de 36 % des voix (l’élection ne comportant qu’un tour), devant Xioamara Castro, l’épouse de Zelaya. Il est réélu quatre ans plus tard avec près de 43 %, alors qu’il n’était pas censé pouvoir se représenter. La contestation des résultats entraîne la mort d’une trentaine de personnes. En 2019, Hernandez et son prédécesseur sont accusés de liens avec le narco-trafic, lors du procès de trafiquants aux États-Unis (dont le propre frère du Président, qui est condamné à la prison à vie).


Fin 2021, à l’issue d’un scrutin présidentiel suivi par 68 % des électeurs (un niveau historique), Xioamara Castro est élue avec 52 % des voix, loin devant le dauphin de Hernandez (lequel ne pouvait se représenter). Le Parti Liberté et refondation (Libre) de la Présidente et de son époux Zelaya remporte également la mairie de la capitale, ainsi qu’une majorité simple à l’Assemblée, alliée au Parti Salvador de Honduras (PSH, du nom de son fondateur). Mais, dès son investiture, la Présidente doit affronter une défection de certains de ses partisans, dont le PSH, qui rejoignent même un éphémère Parlement parallèle. Malgré tout, Castro parvient à promulguer une loi qui réhabilite des milliers de personnes victimes du coup de force de 2009 contre son mari… mais qui bénéficie aussi à des proches du couple présidentiel accusés de corruption, alors que la Présidente a fait campagne sur la lutte contre ce fléau. Malgré le remplacement de très nombreux fonctionnaires par des militants de Libre, souvent sans expérience, les structures du « narco-Etat » des Hernandez restent puissantes dans l’administration et la vie économique, le népotisme n’épargnant pas non plus le camp présidentiel.

En novembre 2022, l’état d’urgence est déclaré face à l’emprise croissante des gangs sur la vie du pays, dont l’extorsion des chauffeurs de bus. En janvier suivant, deux militants environnementaux sont assassinés : ils s’opposaient à un projet de mine à ciel ouvert dans le département de Colon (nord), dont le gouverneur – et principal promoteur du projet – est un proche de Zelaya… mais aussi du cartel Los Cachiros selon la justice américaine. En juin 2023, une quarantaine de femmes sont tuées par balles ou brûlées vives dans un incendie à l’intérieur d’une prison de femmes, à la suite d’une attaque du quartier du MS-13 par des détenues du Barrio 18. A la fin du mois, le gouvernement lance l’opération « Foi et espérance » pour reprendre le contrôle des centres de détention : comme au Salvador, l’armée et la police militaire investissent les deux plus grandes prisons de haute sécurité, réservées aux chefs des maras, et y confisquent d’importantes quantités d’armes et de drogue, introduites grâce à la complicité du personnel pénitentiaire.

Photo : l’église sainte-Marie des douleurs