Canada

Canada

Le pays aux nombreux extrêmes géographiques compte plus d’un quart de minorités francophone et autochtones.

9 984 670 km²[1]

Monarchie constitutionnelle[2] (membre du Commonwealth)

Capitale : Ottawa

Monnaie : dollar canadien

40,7 millions d’habitants dont 37 millions de Canadiens

[1] Deuxième pays le plus vaste du monde (après la Russie)

[2] Le chef d’État du Canada est le souverain britannique

Avec ses 35 563 îles, dont certaines figurent parmi les dix plus grandes du monde (Baffin, Victoria et Ellesmere, au nord du cercle polaire), le Canada possède le plus long littoral de la planète (plus de 202 000 kilomètres) donnant sur les océans Pacifique à l’ouest, Arctique au nord et Atlantique à l’est (avec le plus grand estuaire du monde, celui du saint-Laurent). Sur terre, il compte 8 891 km de frontière avec les États-Unis : une partie au sud et une autre au nord-ouest (2 475 km avec l’État d’Alaska) ; c’est la plus longue frontière du monde séparant deux pays. Il est également séparé… du Danemark par 1,3 km, dans la petite île de Hans : située entre l’île d’Ellesmere et le Groenland danois, elle a été partagée entre le Canada et le Danemark en 2022.

Le pays est majoritairement composé de plaines, avec des plateaux au sud-est et les montagnes Rocheuses à l’ouest (culminant à plus de 5 950 mètres, au Mont Logan). Il compte le plus grand nombre de lacs au monde (plus de 2 000). Le climat varie de tempéré au sud et arctique à l’extrême-nord. Les rigueurs climatiques font que 90 % de la population vit au sud, sur une largeur de 160 km le long de la frontière américaine.

Administrativement, le Canada est une fédération de dix provinces : la plus étendue est le Québec francophone (1 667 441 km²) et la plus peuplée l’Ontario (14 millions d’habitants, dont ceux de la capitale et de Toronto, la plus grande ville du pays) ; la moins grande et la moins peuplée est l’île du Prince Édouard dans l’Atlantique (154 000 habitants sur 5 660 km²). S’y ajoutent trois territoires fédéraux septentrionaux : du Nord-Ouest, du Yukon et du Nunavut ; ce dernier – qui inclut la terre de Baffin, l’île d’Ellesmere et les îles de la baie d’Hudson – a été détaché du premier pour fournir un gouvernement autonome aux Inuits.

Près de 73 % des habitants sont Blancs, se disant Canadiens (32 %), Anglais (18 %), Écossais, Français, Irlandais, Allemands… Ils sont suivis des Asiatiques (18 %), des Autochtones (Amérindiens et Inuits, 4,9 %), des Noirs (3 %), des Latino-Américains (1 %)… Cf : la lente reconnaissance des peuples autochtones.

Les langues officielles sont l’anglais et, depuis 1969, le français. Effectif dans la sphère publique, ce bilinguisme est théorique dans la pratique, puisque à peine 18 % des habitants pratiquent les deux langues ; un peu plus de 67 % ne parlent que l’anglais et un peu plus de 13 % que le français (les 1,5 % restant n’en parlant aucune). Une seule des dix provinces canadiennes, le Nouveau-Brunswick, est officiellement bilingue ; le français est la langue officielle du Québec et l’anglais celle des huit autres, ainsi que deux territoires ; le Nunavut est quadrilingue (anglais, français, inuktitut et inuinnaqtun). Cf. https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/services/langues-officielles-bilinguisme/publications/communautes-situation-minoritaire.html

Sur les 65 % d’habitants déclarant une religion, un peu plus de 53 % sont chrétiens, dont un peu plus de la moitié catholiques ; suivent les méthodistes et calvinistes (Église unie du Canada), anglicans, luthériens, orthodoxes, mennonites, huttérites, mormons (cf. Protestantisme)… Les musulmans sont un peu moins de 5 %, devant les hindous (2,3 %), les sikhs (2 %), les bouddhistes, les juifs et les adeptes de religions traditionnelles.

Selon des fouilles archéologiques, la présence des peuples autochtones sur le territoire du Canada remonte à plus de 26 500 ans dans le nord du Yukon et à 9 500 ans dans le sud de l’Ontario. Ces Amérindiens et Inuits seraient arrivés en Amérique en passant par l’isthme de Béringie situé entre la Sibérie orientale et l’Alaska.

Les premières explorations européennes commencent de l’autre côté du pays, sur la façade atlantique. L’explorateur islandais Leif Erikson aurait été le premier Européen à visiter l’île de Terre-Neuve aux alentours de l’année 990. Des vestiges du village qu’il a construit ont été retrouvés à L’Anse aux Meadows. Cinq cents ans plus tard, le Vénitien Jean Cabot et son fils débarquent sur l’île pour le compte du roi d’Angleterre. Vers 1500, c’est l’explorateur portugais João Fernandes Lavrador qui longe et cartographie un littoral qui sera baptisé de son nom (le Labrador).

Une trentaine d’années plus tard, c’est au nom du roi de France que deux navires venus de Saint-Malo arrivent à Terre-Neuve, explorent le golfe du Saint-Laurent et remontent le fleuve. Débarqué en 1534 à Gaspé, Jacques Cartier prend possession, au nom de François Ier, d’une terre qu’il va nommer Canada, à partir d’un mot iroquois (« kanata ») signifiant village. D’abord limitée à la région actuelle de Québec, cette dénomination va concerner ensuite toute la vallée du Saint-Laurent et cette partie de la « Nouvelle-France », le nom qu’on donne alors à l’ensemble des colonies françaises d’Amérique du nord, dont l’immense Louisiane. En font également partie les îles de Saint-Pierre et Miquelon, au large de Terre-Neuve, où les pêcheurs basques, bretons et normands pratiquent la chasse baleinière.


La colonisation du Canada, accompagnée de la christianisation des autochtones, commence au tout début du XVIIe siècle. En 1608, Samuel Champlain fonde la ville de Québec et en fait la capitale de la Nouvelle-France. Remontant le Saint-Laurent, il établit des relations commerciales, d’abord pacifiques, avec les peuples rencontrés, Innus-Montagnais, Algonquins et Hurons. Les choses vont se dégrader avec la compétition que les Français et les Hollandais, puis les Britanniques, vont se livrer pour le contrôle des territoires, des ports, de la pêche et du commerce de la fourrure. La Grande-Bretagne occupe Terre-Neuve (de 1621 à 1632, avec des colons écossais) et la ville de Québec (de 1629 à 1632). Un peu plus tard, elle incite les Iroquois à attaquer des missions et à massacrer des prêtres catholiques. Plus au nord, des Anglais établissent en 1670 la Compagnie de la baie d’Hudson, destinée à contrôler le commerce des peaux. Londres lui accorde un monopole sur tout le bassin hydrographique de la Baie d’Hudson, soit près de 3,9 millions de km2 : la Terre de Rupert (du nom de son gouverneur).

En parallèle des guerres qu’ils se livrent sur le continent européen, Français et Britanniques se livrent des batailles féroces sur le sol canadien, avec leurs alliés respectifs : les Hurons et les Algonquins pour les premiers, la confédération iroquoise pour les seconds. Les affrontements sont particulièrement violents dans la vallée de l’Ohio, au sud du lac Érié. En 1701, la Nouvelle-France et ses alliés finissent toutefois par signer la Paix des Braves avec les Iroquois.

Après la victoire de la Grande-Bretagne lors de la Guerre de Succession d’Espagne, le traité d’Utrecht (1713) accorde aux Britanniques les possessions françaises de Terre-Neuve et de la baie d’Hudson, ainsi qu’une partie de l’Acadie, la zone située au sud du golfe du Saint-Laurent qui devient la colonie de Nouvelle-Écosse. Les Français parviennent toutefois à conserver une partie de l’Acadie continentale, soit le Nouveau-Brunswick actuel, bien que leur souveraineté sur cette région soit contestée par Londres. La Nouvelle-France agrandit par ailleurs son territoire avec l’exploration de l’ouest canadien, au tournant des années 1730-1740. Le Fort Rouge est construit à l’emplacement actuel de la ville de Winnipeg et les montagnes Rocheuses atteintes, ce qui permet d’explorer les régions actuelles du Montana et du Wyoming.

Un nouveau conflit franco-britannique éclate en 1754 dans la vallée de l’Ohio, deux ans avant le déclenchement de la guerre de Sept-Ans en Europe. Connu sous le nom de guerre de la Conquête ou de French and Indian War (« guerre contre les Français et les Indiens »), il voit s’affronter les Français, leurs milices de la Nouvelle-France et leurs alliés autochtones d’un côté, et les Britanniques, leurs milices nord-américaines et leurs alliés Iroquois de l’autre. Cette période est notamment marquée par la déportation des Acadiens entre 1755 et 1763 : les 12 000 à 18 000 qui contestent la domination britannique sont déportés ou s’enfuient vers diverses destinations ; la moitié en meurent. En 1759-1760, les Anglais s’emparent des villes de Québec, Trois-Rivières et Montréal. En 1763, le traité de Paris qui clôt la guerre de Sept-Ans attribue à la Grande-Bretagne ce qui restait de l’Acadie française, ainsi que l’Île-Royale (île du Cap-Breton dans le golfe du Saint-Laurent) et la partie orientale de la Louisiane d’alors, entre le Mississippi et les Appalaches[1].

Le Canada change alors de nom et devient « the Province of Quebec ». Les droits des citoyens francophones sont réduits et ceux des Amérindiens bafoués. Lorsque les Outaouais se soulèvent contre les Britanniques, entre 1763 et 1766 (rébellion de Pontiac), les soldats anglais répondent notamment avec une arme biologique : la distribution aux autochtones de couvertures infectées par le virus de la variole. A Terre-Neuve, la répression des révoltes et la diffusion de maladies contagieuses ont raison du peuple Béothuk qui passe de plusieurs milliers à quelques centaines d’individus (sa dernière représentante mourra en 1829).

[1] Après la vente de ce qui restait de la Louisiane aux États-Unis, en 1803, l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon (242 km²) demeure la seule possession française en Amérique du Nord.


La naissance des États-Unis – conséquence de la guerre d’indépendance victorieuse menée par les colonies britanniques de Nouvelle-Angleterre – a deux conséquences pour le Canada. La première concerne le territoire de la province de Québec, qui perd la vallée de l’Ohio et voit ses nouvelles frontières méridionales s’arrêter aux barrières naturelles que sont les Grands Lacs et la rivière Niagara. La seconde conséquence est l’immigration de quelques dizaines de milliers de loyalistes à la couronne anglaise au Québec et dans les trois provinces maritimes : la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et l’Île-du-Prince-Édouard (ex-Saint-Jean) érigée en colonie en 1769. Le Nouveau-Brunswick accède à ce statut en 1784, par séparation d’avec la Nouvelle-Écosse.

En 1791, l’Acte constitutionnel voté par le Parlement britannique divise la colonie du Québec en deux colonies distinctes : le Haut-Canada (qui correspond à l’Ontario actuel) majoritairement composé de loyalistes et le Bas-Canada (l’actuel Québec), majoritairement peuplé de francophones qui sont alors nommés « les Canadiens français ». En 1837 et 1838, les deux colonies se soulèvent contre le pouvoir impérial britannique, sur fond de crises économiques et agricoles. Elles sont provoquées par le refus, de la part des autorités coloniales, d’accorder les réformes politiques réclamées par les assemblées législatives des provinces, notamment l’établissement d’un gouvernement responsable. Dans le Bas-Canada, la rébellion des Patriotes se double d’une volonté d’émancipation de la majorité francophone face à la domination politique et économique que lui inflige la minorité britannique. Avant d’être matées, les deux révoltes aboutissent à la proclamation des éphémères République du Canada (sur la rivière Niagara) et République du Madawaska (aux confins du Maine et du Nouveau-Brunswick).

Londres tire les conséquences des mouvements : une partie des droits octroyés aux Canadiens français (par l’Acte de Québec de 1774) sont abrogés et les deux colonies du Canada sont fusionnées dans une province du Canada, communément appelée le Canada-Uni. En réalité, elle compte deux Premiers ministres, du Canada-Est et du Canada-Ouest, qui font alliance et instaurent le premier gouvernement responsable de la province en 1848. Dix-huit ans plus tard, l’Assemblée législative s’installe à Ottawa. A l’ouest, le gouvernement du Royaume-Uni crée la colonie de l’Île de Vancouver en 1849, puis celle de Colombie-Britannique en 1858, lors de la ruée vers l’or.


En 1867, Londres adopte un nouveau dispositif destiné à contrer les visées expansionnistes des États-Unis, mais aussi à noyer les francophones du Canada-Uni dans un ensemble anglophone plus vaste. L’Acte de l’Amérique du Nord britannique crée le Dominion du Canada, qui réunit quatre provinces : le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse ainsi que l’Ontario et le Québec, issus de la division du Canada-Uni.

Premier territoire de l’Empire britannique à accéder à ce statut d’autonomie partielle, le pays entreprend ensuite de s’agrandir vers l’ouest, dans l’immense plaine située entre l’Ontario et la colonie de Colombie-Britannique. C’est chose faite en 1870, lorsque le gouvernement canadien acquiert les possessions de la Compagnie du Nord-Ouest et de la Compagnie de la baie d’Hudson. Elles sont fusionnées en Territoires du Nord-Ouest, à l’exception d’une petite partie de l’ancienne Terre de Rupert qui en est détachée : elle forme le Manitoba, cinquième province du pays constituée à l’issue d’âpres négociations avec les populations métisses locales. En 1871, la colonie de la Colombie-Britannique, qui a absorbé celle de l’Île-de-Vancouver en 1866, devient la sixième province de la Confédération. Elle est suivie, en 1873, de l’Île-du-Prince-Édouard qui avait d’abord milité en faveur d’une union des Provinces maritimes.

La situation reste en revanche tendue dans les plaines de l’Ouest, où le gouvernement canadien applique une politique discriminatoire envers les Amérindiens, les confinant dans des réserves, procédant à l’assimilation des enfants dans des pensionnats spécialement construits à cet effet, se livrant à de nombreuses exécutions et provoquant intentionnellement des famines. En 1869-1870, Londres mate une révolte de Métis (rébellion de la Rivière-Rouge). Pour conserver leur indépendance, une partie des rebelles se déplace vers l’ouest et s’implante sur les rives de la rivière Saskatchewan. Mais l’attribution des terres des Prairies aux immigrants britanniques, dans les années 1880, et l’imposition d’un régime cadastral provoquent un nouveau soulèvement, avorté, en 1884.

En parallèle, le dominion canadien poursuit sa transformation territoriale. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le Yukon, théâtre de la ruée vers l’or dans la région du Klondike, devient un territoire à part entière en 1897. Huit ans plus tard, la partie sud-ouest des Territoires donne naissance aux provinces de l’Alberta et de la Saskatchewan. A l’extrême-nord, au début du XXe siècle, un groupe de marins canadiens-français prend officiellement possession, pour le Canada, d’une série d’îles de l’archipel Arctique, mettant ainsi fin aux prétentions américaines dans la région. En revanche, un contentieux subsiste sur l’Atlantique avec Terre-Neuve qui, ayant refusé de rejoindre le dominion canadien en 1869, a elle-même obtenu ce statut en 1907. Le litige porte sur la frontière entre la province québecoise et le Labrador, la partie continentale dépendant de l’île. En 1927, un tribunal de Londres donne raison à Terre-Neuve, jugement qui est toujours contesté par le Québec.

Entretemps, le Canada a rejoint la Société des Nations, au lendemain de la Première guerre mondiale. En 1931, le Statut de Westminster consacre son indépendance en décidant que plus aucune loi britannique ne pourrait s’appliquer au Canada sans le consentement des autorités canadiennes. En 1949, le pays atteint ses frontières actuelles avec l’adhésion de Terre-Neuve, que la crise économique des années 1930 avait contraint à revenir dans le giron direct de Londres[1]. Le Canada obtient sa pleine indépendance juridique en 1982, lorsqu’il rapatrie sa Constitution restée à Londres et qu’une loi du Parlement britannique en fait un État entièrement souverain. Il conserve néanmoins à sa tête le monarque du Royaume-Uni, représenté dans le pays par un Gouverneur général.

Outre le cas particulier du Québec majoritairement francophone, la fédération connaît quelques « couacs ». Fin 2022, la conservatrice Alberta adopte une « loi sur la souveraineté de l’Alberta dans un Canada uni » pour marquer son mécontentement vis-à-vis de la politique environnementale d’Ottawa, très réservée sur les hydrocarbures. Cet acte législatif accorde à la troisième province la plus riche du pays (du fait de ses ressources naturelles) le pouvoir d’ignorer « les lois fédérales et les initiatives jugées contraires aux intérêts de la province ».

En juin 2023, le Canada atteint quarante millions d’habitants, du fait d’une immigration choisie. La majorité des migrants choisissant de s’installer dans des provinces anglophones, la part du Québec devrait passer de 29 % de la population dans les années 1950 à moins de 20 % dans les années 2030.

[1] En 2001, la province a pris le nom de Terre-Neuve-et-Labrador (environ 115 000 et 290 000 km²).

La lente reconnaissance des peuples autochtones

Les peuples autochtones (qui ont obtenu le droit de vote en 1960) représentent près de 5 % de la population canadienne. Environ 60 % d’entre eux sont membres des Premières Nations, le nom générique donné à une soixantaine de peuples amérindiens parlant autant de langues : Micmacs, Algonquins, Malécites, Cris, Mohawks, Hurons, Ojibwés… 44 % des ces « Indiens » habitent des réserves. Les plus nombreux vivent en Ontario, en Colombie-britannique et au Manitoba.

35 % des Autochtones sont des Métis (vivant aux deux-tiers dans les villes) et 4 % des Inuits, soit environ 40 % des 150 000 membres de ce peuple, jadis qualifié d’Esquimau (les autres vivant au Groenland, en Alaska et en Russie extrême-orientale). Les langues inuites comptent quatre grands ensembles dialectaux : l’inuktikut (Nunavut, Québec, Labrador), l’inuvialuktun parlé dans le Nord-Ouest canadien, l’inupiaq en Alaska et le groenlandais au Groenland.

Les trois quarts des Inuits du Canada habitent ce qu’ils dénomment l’Inuit Nunangat (« terres, eaux et glaces du peuple [inuit] »), un territoire de plus de 3,3 millions de km² comprenant quatre régions administratives : le Nunavut (entité autonome créée en 1999 au nord du détroit d’Hudson), le Nunavik (500 000 km² gérés par l’Administration régionale Kativik, dans le nord du Québec), l’Inuvialuit dans la région arctique occidentale et le Nunatsiavut à l’extrême nord-est du Labrador.

2 093 190 km2, 40 000 habitants, capitale Iqaluit

Des poussées de fièvre agitent régulièrement les communautés (« bandes ») amérindiennes. La dernière a eu lieu au printemps 1990 au Québec, lorsqu’une municipalité a voulu raser, à des fins immobilières, une pinède centenaire chère aux Mohawks. Équipés d’armes automatiques, ces membres de l’ensemble Iroquois ont occupé les lieux, avant de déposer les armes en septembre. Entretemps, leurs affrontements avec les forces de l’ordre avaient fait un mort dans les rangs de la police.

Depuis, l’affaire la plus sensible est celle du placement d’enfants en « écoles résidentielles indiennes » institué en 1876 par l’Indian Act, qui restreignait les droits, notamment patrimoniaux, des « Premières Nations » et interdisait certaines de leurs pratiques cultuelles et culturelles. Dans un rapport établi en 2015, la Commission de vérité et de réconciliation du Canada a établi que le pays avait compté 139 pensionnats autochtones entre 1880 et 1996 (date de fermeture du dernier). Tenus par des franciscains, les premiers ont été ouverts en Nouvelle-France en 1620. Ensuite, durant plus d’un siècle, le dominion du Canada a arraché (dès l’âge de trois ans) plus de 150 000 enfants à leurs familles, pour les confier, parfois à des milliers de kilomètres, à ces écoles, gérées le plus souvent par l’Église catholique, afin « de tuer l’Indien qui était en eux » et les assimiler à la culture blanche dominante. Sous l’effet des maladies, de la sous-nutrition, des sévices psychologiques et sexuels subis, près de 3 200 enfants autochtones seraient morts dans ces pensionnats. En 2021, plus de 200 ossements d’enfants ont été découverts dans un ancien pensionnat autochtone de Colombie britannique et plus de 750 sépultures anonymes trouvées dans un autre ancien pensionnat du Saskatchewan.

Des avancées notables dans les relations entre le gouvernement fédéral et les Autochtones ont eu lieu depuis l’arrivée au pouvoir du libéral Justin Trudeau. En 2015, son gouvernement compte deux représentants des Peuples premiers à des ministères régaliens (justice et intérieur). En 2021, une Inuit est nommée, pour la première fois, Gouverneure générale, c’est-à-dire représentante de la reine d’Angleterre au Canada. En 2023, un accord est signé avec les 325 communautés autochtones pour les dédommager, à hauteur de 2,8 milliards de dollars canadiens, des sévices subis entre la fin du dix-neuvième siècle et les années 1990. En janvier 2024, le Nunavut obtient, comme le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, le contrôle total de ses terres et de ses ressources (or, minerais et hydrocarbures).

Pour en savoir plus sur les Peuples premiers : https://www.rcaanc-cirnac.gc.ca/fra/1100100013791/1535470872302

Le cas particulier du Québec

1 542 056 km2

8,5 millions de Québécois

Capitale : Québec

Plus ou moins mises sous l’éteignoir depuis la répression de la révolte des Patriotes (1837-1838), les revendications politiques des francophones québécois refont surface dans les années 1960 : elles portent sur une plus grande autonomie provinciale, voire sur l’indépendance totale du Québec. Cette revendication prend même une forme radicale, entre 1963 et 1972 : le Front de libération du Québec commet près de trois-cents attentats à la bombe, qui font une dizaine de morts. Mais l’essentiel des revendications prend une forme pacifiste. En 1968 naît le Parti québécois (PQ), un an après que le général De Gaulle a prononcé son célèbre « Vive le Québec libre » à Montréal. Vainqueur des législatives provinciales de 1976, le PQ fait adopter l’année suivante la Charte de la langue française (communément appelée la loi 1011) qui fait du français l’unique langue officielle du Québec. Jalouse de ses prérogatives, la province ne délègue par ailleurs aucune de ses compétences législatives à des organismes de collaboration interprovinciale.

En revanche, les tentatives de proclamer l’indépendance de la province – qui n’a jamais ratifié la loi constitutionnelle de 1982 sur l’indépendance du Canada – sont des échecs. La proposition de souveraineté-association, faite au référendum de 1980, est rejetée par près de 60 % des électeurs. Sept ans plus tard, le gouvernement fédéral propose aux dix provinces un accord, dit du lac Meech, qui comporte notamment la reconnaissance du Québec en tant que société distincte au sein du Canada. Son rejet par la majorité anglophone entraîne une remontée du sentiment souverainiste : l’indépendance est de nouveau rejetée au référendum de 1995, mais à seulement 50,6 %, 60 % des électeurs francophones ayant voté en sa faveur. Dans les sondages, la cause indépendantiste est aujourd’hui revenue à son niveau de 1980. Depuis 1991, les affaires de la province sont défendues au Parlement d’Ottawa par le Bloc québécois (BQ), parti à vocation nationale (à la différence du PQ) fondé par des membres des partis conservateur et libéral du Canada ayant rompu avec leurs formations, après l’abandon des accords du lac Meech.

En 2006, un certain nombre d’avancées d’ordre culturel ont été enregistrées, sous l’égide d’un gouvernement fédéral conservateur. La province a d’abord été autorisée à rejoindre l’Unesco en tant que membre associé. La Chambre des communes a ensuite voté, à une très large majorité, une motion qui reconnaît que « les Québécois forment une nation au sein d’un Canada uni ».

Après avoir obtenu entre 49 % et 38 % des voix québécoises aux élections fédérales tenues entre 1993 et 2008, le BQ – souverainiste et social-démocrate – a connu un net « trou d’air » aux suivantes, avant de retrouver un score supérieur à 32 % aux scrutins de 2019 et 2021. La même crise affecte le Parti québécois aux élections provinciales : victime de scissions indépendantistes sur sa gauche (Option nationale et Québec solidaire), le PQ est surtout concurrencé sur sa droite par les dissidents de la Coalition Avenir Québec (CAQ). Favorable au développement de la « belle province » au sein de la Fédération, la formation remporte la majorité absolue des sièges aux élections provinciales de 2018. En 2022, au grand dam des 9 % d’anglophones et des autochtones du Québec, son gouvernement renforce l’usage du français dans les entreprises et les commerces, ainsi que son apprentissage chez les nouveaux arrivants, afin d’éviter une « louisianisation[1] ». Les élections provinciales de 2022 confirment la partition du Québec entre Montréal et le reste de la région : les libéraux fédéralistes sont en tête dans le poumon économique de la province et les partis régionaux partout ailleurs (41 % au total pour le CAQ et 15 % pour le PQ).

[1] En Louisiane américaine, le nombre de locuteurs du français serait passé d’un million en 1970 à environ 300 000 en 2023.

Pour en savoir plus : https://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/cnd_antifranco.htm

Photo de une : maison traditionnelle dans l’île du Prince-Édouard.