Canada

Canada

Le pays aux nombreux extrêmes géographiques compte plus d’un quart de minorités francophone et autochtones.

9 984 670 km²[1]

Monarchie constitutionnelle[2] (membre du Commonwealth)

Capitale : Ottawa

Monnaie : dollar canadien

40,7 millions d’habitants dont 37 millions de Canadiens

[1] Deuxième pays le plus vaste du monde (après la Russie)

[2] Le chef d’État du Canada est le souverain britannique

Avec ses 35 563 îles, dont certaines figurent parmi les dix plus grandes du monde (Baffin, Victoria et Ellesmere, au nord du cercle polaire), le Canada possède le plus long littoral de la planète (plus de 202 000 kilomètres) donnant sur les océans Pacifique à l’ouest, Arctique au nord et Atlantique à l’est (avec le plus grand estuaire du monde, celui du saint-Laurent). Deux contentieux maritimes l’opposent aux États-Unis : au sujet de la mer de Beaufort, riche en hydrocarbures (21 000 km² au nord du Yukon et de l’Alaska) et au sujet du passage du Nord-Ouest (de la terre de Baffin à la mer de Beaufort) que Washington considère comme un détroit international et non comme des eaux canadiennes.

Sur terre, il compte 8 891 km de frontière avec les États-Unis : une partie au sud et une autre au nord-ouest (2 475 km avec l’État d’Alaska) ; c’est la plus longue frontière du monde séparant deux pays. Il est également séparé… du Danemark par 1,3 km, dans la petite île de Hans : située entre l’île d’Ellesmere et le Groenland danois, elle a été partagée entre le Canada et le Danemark en 2022.

Le pays est majoritairement composé de plaines, avec des plateaux au sud-est et les montagnes Rocheuses à l’ouest (culminant à plus de 5 950 mètres, au Mont Logan). Il compte le plus grand nombre de lacs au monde (plus de deux millions, couvrant 7 % du territoire). Le climat varie de tempéré au sud et arctique à l’extrême-nord. Les rigueurs climatiques font que 90 % de la population vit au sud, sur une largeur de 160 km le long de la frontière américaine.

Administrativement, le Canada est une fédération de dix provinces : la plus étendue est le Québec francophone (1 667 441 km²) et la plus peuplée l’Ontario (14 millions d’habitants, dont ceux de la capitale et de Toronto, la plus grande ville du pays) ; la moins grande et la moins peuplée est l’île du Prince Édouard dans l’Atlantique (154 000 habitants sur 5 660 km²). S’y ajoutent trois territoires fédéraux septentrionaux : du Nord-Ouest, du Yukon et du Nunavut ; ce dernier – qui inclut la terre de Baffin, l’île d’Ellesmere et les îles de la baie d’Hudson – a été détaché du premier pour fournir un gouvernement autonome aux Inuits.

Près de 73 % des habitants sont Blancs, se disant Canadiens (32 %), Anglais (18 %), Écossais, Français, Irlandais, Allemands… Ils sont suivis des Asiatiques (18 %), des Autochtones (Amérindiens et Inuits, 4,9 %), des Noirs (3 %), des Latino-Américains (1 %)… Cf : la lente reconnaissance des peuples autochtones.

Les langues officielles sont l’anglais et, depuis 1969, le français. Effectif dans la sphère publique, ce bilinguisme est théorique dans la pratique, puisque à peine 18 % des habitants pratiquent les deux langues ; un peu plus de 67 % ne parlent que l’anglais et un peu plus de 13 % que le français (les 1,5 % restant n’en parlant aucune). Une seule des dix provinces canadiennes, le Nouveau-Brunswick, est officiellement bilingue ; le français est la langue officielle du Québec et l’anglais celle des huit autres, ainsi que deux territoires ; le Nunavut est quadrilingue (anglais, français, inuktitut et inuinnaqtun). Cf. https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/services/langues-officielles-bilinguisme/publications/communautes-situation-minoritaire.html

Sur les 65 % d’habitants déclarant une religion, un peu plus de 53 % sont chrétiens, dont un peu plus de la moitié catholiques ; suivent les méthodistes et calvinistes (Église unie du Canada), anglicans, luthériens, orthodoxes, mennonites, huttérites, mormons (cf. Protestantisme)… Les musulmans sont un peu moins de 5 %, devant les hindous (2,3 %), les sikhs (2 %), les bouddhistes, les juifs et les adeptes de religions traditionnelles.

Premier territoire de l’Empire britannique à accéder (en 1867) au statut de dominion, qui lui offre une autonomie partielle, le Canada entreprend de s’agrandir vers l’ouest et le nord-ouest, dans l’immense plaine située entre l’Ontario et la colonie de Colombie-Britannique (créée à partir d’une partie de l’Oregon). C’est chose faite en 1870, lorsque le gouvernement canadien acquiert les possessions de la Compagnie du Nord-Ouest et de la Compagnie de la baie d’Hudson. Elles sont fusionnées en Territoires du Nord-Ouest, à l’exception d’une petite partie qui en est détachée pour former le Manitoba, cinquième province du pays constituée à l’issue d’âpres négociations avec les populations métisses locales. En 1871, la colonie de la Colombie-Britannique, qui a absorbé celle de l’Île-de-Vancouver en 1866, devient la sixième province de la Confédération. Elle est suivie, en 1873, de l’Île-du-Prince-Édouard qui avait d’abord milité en faveur d’une union des Provinces maritimes.

La situation reste en revanche tendue dans les plaines de l’Ouest, où le gouvernement canadien applique une politique discriminatoire envers les Amérindiens, les confinant dans des réserves, procédant à l’assimilation des enfants dans des pensionnats spécialement construits à cet effet, se livrant à de nombreuses exécutions et provoquant intentionnellement des famines. En 1869-1870, Londres mate une révolte de Métis (rébellion de la Rivière-Rouge). Pour conserver leur indépendance, une partie des rebelles se déplace vers l’ouest et s’implante sur les rives de la rivière Saskatchewan. Mais l’attribution des terres des Prairies aux immigrants britanniques, dans les années 1880, et l’imposition d’un régime cadastral provoquent un nouveau soulèvement, avorté, en 1884.

En parallèle, le dominion canadien poursuit sa transformation territoriale. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le Yukon, théâtre de la ruée vers l’or dans la région du Klondike, devient un territoire à part entière en 1897. Huit ans plus tard, la partie sud-ouest des Territoires donne naissance aux provinces de l’Alberta et de la Saskatchewan. A l’extrême-nord, au début du XXe siècle, un groupe de marins canadiens-français prend officiellement possession, pour le Canada, d’une série d’îles de l’archipel Arctique, mettant ainsi fin aux prétentions américaines dans la région. En revanche, un contentieux subsiste dans l’Atlantique avec Terre-Neuve, qui a refusé de rejoindre le Canada en 1869 et a obtenu son propre statut de dominion en 1907. Le litige porte sur la frontière entre la province québecoise et le Labrador, la partie continentale qui dépend de l’île. En 1927, un tribunal de Londres donne raison à Terre-Neuve, jugement qui est toujours contesté par le Québec.

Entretemps, le Canada a rejoint la Société des Nations, au lendemain de la Première guerre mondiale. En 1931, le Statut de Westminster consacre son indépendance en décidant que plus aucune loi britannique ne pourrait s’appliquer au Canada sans le consentement des autorités canadiennes. En 1949, le pays atteint ses frontières actuelles avec l’adhésion de Terre-Neuve, que la crise économique des années 1930 avait contraint à revenir dans le giron direct de Londres[1]. Le Canada obtient sa pleine indépendance juridique en 1982, lorsqu’il rapatrie sa Constitution restée à Londres et qu’une loi du Parlement britannique en fait un État entièrement souverain. Il conserve néanmoins à sa tête le monarque du Royaume-Uni, représenté dans le pays par un Gouverneur général.


Outre le cas particulier du Québec majoritairement francophone, la fédération connaît quelques « couacs ». Fin 2022, la conservatrice Alberta adopte une « loi sur la souveraineté de l’Alberta dans un Canada uni » pour marquer son mécontentement vis-à-vis de la politique environnementale d’Ottawa, très réservée sur les hydrocarbures. Cet acte législatif accorde à la troisième province la plus riche du pays (du fait de ses ressources naturelles) le pouvoir d’ignorer « les lois fédérales et les initiatives jugées contraires aux intérêts de la province ».

En juin 2023, le Canada atteint quarante millions d’habitants, du fait d’une immigration choisie. La majorité des migrants choisissant de s’installer dans des provinces anglophones, la part du Québec devrait passer de 29 % de la population dans les années 1950 à moins de 20 % dans les années 2030.

En 2025, le Canada annonce sa volonté de renforcer sa présence en zone arctique (qui représente 40 % de son territoire), face à l’augmentation attendue du trafic maritime dans la région (du fait de la fonte des glaces) et face aux prétentions des États-Unis – dont le Président libéral et populiste Trump parle d’annexer son voisin canadien ainsi que le Groenland danois – de la Russie – qui demande à chevaucher le plateau continental canadien pour accroître le sien – et de la Chine, qui mène des missions de plus en plus nombreuses dans la zone, officiellement à des fins scientifiques. Les investissements dans les infrastructures militaires canadiennes en Arctique pourraient être multipliées par dix en vingt ans. En avril, le Parti libéral (PL) remporte les élections législatives, pour la quatrième fois consécutive : face aux menaces états-uniennes, les électeurs préfèrent un économiste réputé comme Premier ministre, plutôt que le candidat du Parti conservateur jugé trop proche des idées de Trump. Bien qu’en progression, les conservateurs sont devancés en sièges et en voix par les libéraux, ces derniers ratant de peu la majorité absolue. Le Nouveau Parti démocratique (gauche) et les Verts s’effondrent, ce qui donne au Bloc québécois une position privilégiée de force d’appoint : bien qu’en recul dans la « Belle province » (où elle est devancée par le PL), la formation souverainiste arrive en effet en troisième position.

[1] En 2001, la province a pris le nom de Terre-Neuve-et-Labrador (respectivement 115 000 et 290 000 km²).

La lente reconnaissance des autochtones

Les peuples autochtones (qui ont obtenu le droit de vote en 1960) représentent près de 5 % de la population canadienne. Environ 60 % d’entre eux sont membres des Premières Nations, le nom générique donné à une soixantaine de peuples amérindiens parlant autant de langues : Micmacs, Algonquins, Malécites, Cris, Mohawks, Hurons, Ojibwés… 44 % des ces « Indiens » vivent dans 2500 réserves. Les plus nombreux vivent en Ontario, en Colombie-britannique et au Manitoba.

35 % des Autochtones sont des Métis (vivant aux deux-tiers dans les villes) et 4 % des Inuits, soit environ 40 % des 150 000 membres de ce peuple, jadis qualifié d’Esquimau (les autres vivant au Groenland, en Alaska et en Russie extrême-orientale). Les langues inuites comptent quatre grands ensembles dialectaux : l’inuktikut (Nunavut, Québec, Labrador), l’inuvialuktun parlé dans le Nord-Ouest canadien, l’inupiaq en Alaska et le groenlandais au Groenland.

Les trois quarts des Inuits du Canada habitent ce qu’ils dénomment l’Inuit Nunangat (« terres, eaux et glaces du peuple [inuit] »), un territoire de plus de 3,3 millions de km² comprenant quatre régions administratives : le Nunavut (entité autonome créée en 1999 au nord du détroit d’Hudson), le Nunavik (500 000 km² gérés par l’Administration régionale Kativik, dans le nord du Québec), l’Inuvialuit dans la région arctique occidentale et le Nunatsiavut à l’extrême nord-est du Labrador.

2 093 190 km2, 40 000 habitants, capitale Iqaluit

Des poussées de fièvre agitent régulièrement les communautés (« bandes ») amérindiennes. La dernière a eu lieu au printemps 1990 au Québec, lorsqu’une municipalité a voulu raser, à des fins immobilières, une pinède centenaire chère aux Mohawks. Équipés d’armes automatiques, ces membres de l’ensemble Iroquois ont occupé les lieux, avant de déposer les armes en septembre. Entretemps, leurs affrontements avec les forces de l’ordre avaient fait un mort dans les rangs de la police.

Depuis, l’affaire la plus sensible est celle du placement d’enfants en « écoles résidentielles indiennes » institué en 1876 par l’Indian Act, qui restreignait les droits, notamment patrimoniaux, des « Premières Nations » et interdisait certaines de leurs pratiques cultuelles et culturelles. Dans un rapport établi en 2015, la Commission de vérité et de réconciliation du Canada a établi que le pays avait compté 139 pensionnats autochtones entre 1880 et 1996 (date de fermeture du dernier). Tenus par des franciscains, les premiers ont été ouverts en Nouvelle-France en 1620. Ensuite, durant plus d’un siècle, le dominion du Canada a arraché (dès l’âge de trois ans) plus de 150 000 enfants à leurs familles, pour les confier, parfois à des milliers de kilomètres, à ces écoles, gérées le plus souvent par l’Église catholique, afin « de tuer l’Indien qui était en eux » et les assimiler à la culture blanche dominante. Sous l’effet des maladies, de la sous-nutrition, des sévices psychologiques et sexuels subis, près de 3 200 enfants autochtones seraient morts dans ces pensionnats. En 2021, plus de 200 ossements d’enfants ont été découverts dans un ancien pensionnat autochtone de Colombie britannique et plus de 750 sépultures anonymes trouvées dans un autre ancien pensionnat du Saskatchewan.

Des avancées notables dans les relations entre le gouvernement fédéral et les Autochtones ont eu lieu depuis l’arrivée au pouvoir du libéral Justin Trudeau. En 2015, son gouvernement compte deux représentants des Peuples premiers à des ministères régaliens (justice et intérieur). En 2021, une Inuit est nommée, pour la première fois, Gouverneure générale, c’est-à-dire représentante de la reine d’Angleterre au Canada. En 2023, un accord est signé avec les 325 communautés autochtones pour les dédommager, à hauteur de 2,8 milliards de dollars canadiens, des sévices subis entre la fin du dix-neuvième siècle et les années 1990. En janvier 2024, le Nunavut obtient, comme le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, le contrôle total de ses terres et de ses ressources (or, minerais et hydrocarbures).

Pour en savoir plus sur les Peuples premiers : https://www.rcaanc-cirnac.gc.ca/fra/1100100013791/1535470872302

Le cas particulier du Québec

1 542 056 km2

8,5 millions de Québécois

Capitale : Québec

Plus ou moins mises sous l’éteignoir depuis la répression de la révolte des Patriotes (1837-1838), les revendications politiques des francophones québécois refont surface dans les années 1960 : elles portent sur une plus grande autonomie provinciale, voire sur l’indépendance totale du Québec. Cette revendication prend même une forme radicale, entre 1963 et 1972 : le Front de libération du Québec commet près de trois-cents attentats à la bombe, qui font une dizaine de morts. Mais l’essentiel des revendications prend une forme pacifiste. En 1968 naît le Parti québécois (PQ), un an après que le général De Gaulle a prononcé son célèbre « Vive le Québec libre » à Montréal. Vainqueur des législatives provinciales de 1976, le PQ fait adopter l’année suivante la Charte de la langue française (communément appelée la loi 1011) qui fait du français l’unique langue officielle du Québec. Jalouse de ses prérogatives, la province ne délègue par ailleurs aucune de ses compétences législatives à des organismes de collaboration interprovinciale.

En revanche, les tentatives de proclamer l’indépendance de la province – qui n’a jamais ratifié la loi constitutionnelle de 1982 sur l’indépendance du Canada – sont des échecs. La proposition de souveraineté-association, faite au référendum de 1980, est rejetée par près de 60 % des électeurs. Sept ans plus tard, le gouvernement fédéral propose aux dix provinces un accord, dit du lac Meech, qui comporte notamment la reconnaissance du Québec en tant que société distincte au sein du Canada. Son rejet par la majorité anglophone entraîne une remontée du sentiment souverainiste : l’indépendance est de nouveau rejetée au référendum de 1995, mais à seulement 50,6 %, 60 % des électeurs francophones ayant voté en sa faveur. Dans les sondages, la cause indépendantiste est aujourd’hui revenue à son niveau de 1980. Depuis 1991, les affaires de la province sont défendues au Parlement d’Ottawa par le Bloc québécois (BQ), parti à vocation nationale (à la différence du PQ) fondé par des membres des partis conservateur et libéral du Canada ayant rompu avec leurs formations, après l’abandon des accords du lac Meech.

En 2006, un certain nombre d’avancées d’ordre culturel ont été enregistrées, sous l’égide d’un gouvernement fédéral conservateur. La province a d’abord été autorisée à rejoindre l’Unesco en tant que membre associé. La Chambre des communes a ensuite voté, à une très large majorité, une motion qui reconnaît que « les Québécois forment une nation au sein d’un Canada uni ».

Après avoir obtenu entre 49 % et 38 % des voix québécoises aux élections fédérales tenues entre 1993 et 2008, le BQ – souverainiste et social-démocrate – a connu un net « trou d’air » aux suivantes, avant de retrouver un score supérieur à 32 % aux scrutins de 2019 et 2021. La même crise affecte le Parti québécois aux élections provinciales : victime de scissions indépendantistes sur sa gauche (Option nationale et Québec solidaire), le PQ est surtout concurrencé sur sa droite par les dissidents de la Coalition Avenir Québec (CAQ). Favorable au développement de la « belle province » au sein de la Fédération, la formation remporte la majorité absolue des sièges aux élections provinciales de 2018. En 2022, au grand dam des 9 % d’anglophones et des autochtones du Québec, son gouvernement renforce l’usage du français dans les entreprises et les commerces, ainsi que son apprentissage chez les nouveaux arrivants, afin d’éviter une « louisianisation[1] ». Les élections provinciales de 2022 confirment la partition du Québec entre Montréal et le reste de la région : les libéraux fédéralistes sont en tête dans le poumon économique de la province et les partis régionaux partout ailleurs (41 % au total pour le CAQ et 15 % pour le PQ).

[1] En Louisiane américaine, le nombre de locuteurs du français serait passé d’un million en 1970 à environ 300 000 en 2023.

Pour en savoir plus : https://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/cnd_antifranco.htm

Photo de une : maison traditionnelle dans l’île du Prince-Édouard.